Le développement des recherches fondamentales concernant l’intelligence artificielle et ses champs d’application, dans une perspective interdisciplinaire, constitue aujourd’hui une priorité scientifique. Du point de vue des sciences juridiques, l’un des axes prioritaires de ces recherches concerne l’utilisation de l’IA en matière de justice.
Comme nous l’avions annoncé dans l’article précédent sur le blog, un nouveau projet de recherche portant sur la justice prédictive et le contentieux électoral est amorcé pour l’année prochaine.
Le projet interdisciplinaire « Justice algorithmique des élections » (JADE), porté par le Centre de recherches juridiques de l’Université Grenoble-Alpes (CRJ), le Laboratoire Jean Kuntzmann (LJK), le LIG (Laboratoire d’informatique de Grenoble), avec le soutien du laboratoire PACTE (chaire de société algorithmique du MIAI) a pour finalité de proposer la construction de méthodes de mathématiques appliquées et d’intelligence artificielle à un objet juridique pour lequel ces méthodes n’ont encore jamais été utilisées et présentent un intérêt particulier, le contentieux des élections politiques. L’hypothèse retenue est que la justice automatisée ou prédictive pourrait s’avérer particulièrement envisageable et pertinente en matière de contentieux électoral, de sorte qu’elle pourrait révéler sa rationalité, diminuer son arbitraire, et augmenter son efficacité. Ce projet IRGA, proposé par Romain Rambaud, a bénéficié d’une aide de l’Etat gérée par l’Agence Nationale de la Recherche au titre du programme « Investissements d’avenir » portant la référence ANR-15-IDEX-02 : il bénéficie d’une Allocation De Recherche (ADR) et d’un budget conséquent attribué par le pôle PSS (Sciences sociales) et par le pôle MSTIC (Mathématiques, sciences et technologies de l’information et de la communication).
Vous trouverez ci-dessous un bref descriptif du projet ainsi que la fiche de poste pour l’allocation doctorale. Le dossier de candidature est entièrement dématérialisé et sera envoyé sous format PDF à crj@univ-grenoble-alpes.fr au plus tard le 25 août 2022.
Un très beau projet à venir pour les trois prochaines années, donc, et un vrai plaisir pour l’auteur de ses lignes de poursuivre ses travaux de recherche fondamentale en contentieux électoral en adoptant de nouvelles problématiques et de nouvelles méthodes, prioritaires pour l’Université Grenoble Alpes et la recherche contemporaine.
Description du projet JADE
Le développement des recherches fondamentales concernant l’intelligence artificielle et ses champs d’application, dans une perspective interdisciplinaire, constitue aujourd’hui une priorité scientifique. Du point de vue des sciences juridiques, l’un des axes prioritaires de ces recherches concerne l’utilisation de l’IA en matière de justice. Cette problématique est une thématique de recherche émergente du Centre de recherches juridiques de l’Université Grenoble-Alpes (CRJ). Le projet interdisciplinaire JADE a donc pour finalité de proposer la construction de méthodes de mathématiques appliquées et d’intelligence artificielle à un objet juridique pour lequel ces méthodes n’ont encore jamais été utilisées et présentent un intérêt particulier, le contentieux des élections politiques. L’hypothèse retenue est donc que la justice automatisée ou prédictive pourrait s’avérer particulièrement envisageable et pertinente en matière de contentieux électoral, de sorte qu’elle pourrait révéler sa rationalité, diminuer son arbitraire, et augmenter son efficacité. Le projet poursuivra de ce point de vue le travail en cours du porteur du projet, Romain Rambaud, sur une approche empirique et mathématique du contentieux électoral (v. R. Rambaud, Les « lois » de l’écart de voix, AJDA, 2020, p. 1596 ; Contentieux électoral et abstention. Analyse empirique du déclin d’une hypothèse, AJDA, 2022, p. 1097).
Les algorithmes de justice prédictive se décomposent en deux étapes successives : la première est la mise en place des données et la seconde est l’analyse par des logiciels de ces données afin d’obtenir la solution la plus probable. Ce double travail sera réalisé en équipe par le titulaire de l’ADR, le porteur du projet Romain Rambaud, les enseignants-chercheurs statisticiens et informaticiens associés au projet, ainsi que l’équipe de stagiaires qui les accompagneront.
En premier lieu, il sera nécessaire de constituer une base de données du contentieux électoral et proposer une extraction des variables déterminantes. Ces variables sont quantitatives (résultats des élections et écarts de voix en nombre exact de voix et en pourcentage de suffrages exprimés) et qualitatives (types d’irrégularités, moment où les irrégularités se produisent, paramètres du mode de scrutin, nombre de candidats en présence, années de l’élection, voire des variables plus politiques comme les nuances des candidats ou le statut de sortant). La première année du projet au moins sera consacrée à ce travail préalable indispensable.
En deuxième lieu, la méthode mobilisera des techniques mathématiques et informatiques visant à déterminer dans quelle mesure le raisonnement du juge électoral suit et pourrait être exprimé sous forme de raisonnements automatisables. Tout d’abord seront utilisées les méthodes de régression logistique et la sélection de variables (LJK), modèle statistique permettant d’expliquer une réponse binaire (ici essentiellement annulation ou non de l’élection) à partir d’un certain nombre de variables explicatives, la régression logistique permettant de mesurer l’influence de chacune des variables via un coefficient. Egalement, seront utilisés des arbres de décision, ou des variantes de ces arbres (LIG). Pour ce faire, le projet utilisera le logiciel Treensight, développé par le LIG et validé par le Comité d’Investissement de la SATT-Linksium Grenoble-Alpes. En cas de succès pour le contentieux électoral, le logiciel Treensight pourrait alors devenir un outil utilisable en matière de justice prédictive.
Le projet donnera lieu à la rédaction d’une thèse et à la production de différents articles dans des revues juridiques. Un colloque final de restitution des résultats serait organisé si cela est possible au Conseil d’Etat et/ou au Conseil constitutionnel afin de partager les résultats de la recherche avec les juges électoraux. Un prolongement possible de ce projet, pour les années à venir, serait de poursuivre la recherche par des techniques de textmining et de deeplearning.
Description de la structure de recherche (CRJ)
Le Centre de Recherches Juridiques est une équipe d’accueil de l’Université Grenoble Alpes reconnue par le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche particulièrement bien évaluée par l’HCERES en 2015, puis en 2020. Il regroupe l’essentiel des enseignants-chercheurs (près de 60) et des doctorants en droit privé et en droit public (près de 80) de la Faculté de droit de Grenoble.
Il est structuré en trois axes principaux de recherche : 1/ Justice et liberté, 2/ Innovation et 3/ Action publique et territoire. Il développe aussi des projets scientifiques transversaux qui associent des chercheurs de différentes spécialités ou de disciplines voisines. Chaque année, il propose une vingtaine de manifestations scientifiques : colloques, conférences, séminaires, et bénéficie de partenariats nationaux et internationaux.
Description de l’équipe
L’équipe du projet JADE est composée de :
Porteur du projet JADE et directeur de thèse du doctorant :
• Romain RAMBAUD – juriste (CRJ)
Titulaire de l’Allocation de Recherche
– Un étudiant de niveau Master 2 en droit public ayant de très bonnes connaissances en droit électoral et contentieux électoral et ayant un intérêt particulier pour les sciences statistiques et informatiques.
Enseignants-chercheurs partenaires du projet :
• Gilles BISSON – informaticien (LIG)
• Julien MARINESCU – ingénieur (LIG)
• Annette CASAGRANDE – ingénieure (LIG)
• Frédérique LETUÉ – statisticienne (LJK)
• Marie-José MARTINEZ – statisticienne (LJK)
• Frédérique LEBLANC – statisticienne (LJK)
• Laurence DUMOULIN – sociologue (PACTE).
Des étudiants stagiaires, en droit (CRJ), en statistiques (LJK) et en informatique (LIG) : l’idée du projet sur ce point est que le porteur du projet, le doctorant titulaire de l’ADR et les enseignants-chercheurs impliqués aient en permanence à leur disposition un étudiant stagiaire pour les assister sur les plans techniques.
Description de la mission du titulaire de l’Allocation de Recherche
Mission :
Sous la direction du porteur de projet, le professeur de droit public Romain Rambaud (CRJ), le doctorant devra rédiger une thèse ayant pour objet d’élaborer une base de données complète du contentieux des élections politiques en dégageant les variables déterminantes de celui-ci, et de chercher à produire des résultats en termes de systématisation, de mathématisation et d’algorithimisation du raisonnement du juge électoral (tribunaux administratifs, Conseil d’Etat et Conseil constitutionnel). Ce travail sera effectué avec l’aide des enseignants-chercheurs du LJK (Laboratoire Jean Kuntzmann, statistiques), du LIG avec l’utilisation du logiciel Treensight (Laboratoire d’informatique de Grenoble, informatique et IA), de PACTE (Chaire de société algorithmique du MIAI) et de stagiaires recrutés surtout pour les parties statistiques et informatiques. Il s’agira de vérifier ou non des « lois » du contentieux électoral proposées par le porteur de projet dans ses travaux précédents, de les affiner, de les compléter, de les tester, de les approfondir pour proposer in fine des solutions pour une justice prédictive en matière de contentieux électoral, ainsi qu’explorer ses limites.
Le porteur de projet tient à disposition des candidats intéressés le descriptif complet du projet JADE.
Activités principales :
1) Analyse de l’état de l’art sur la justice prédictive et apports pour la justice algorithmique des élections. Le doctorant devra d’abord réaliser un bilan complet des travaux sur la justice prédictive, y compris en langue anglaise, afin de faire la synthèse des problématiques soulevées et des réponses techniques apportées en l’état. Il devra rechercher si un travail sur la justice prédictive en contentieux électoral a ou non été mené dans la littérature scientifique mondiale. Cela permettra également d’inscrire le projet dans le cadre plus large de la progression de la recherche en matière d’IA, notamment dans le domaine du droit et de la justice.
2) Elaboration de la base de données. Un travail important du doctorant sera, en collaboration avec le porteur du projet et les chercheurs impliqués du LJK et du LIG, d’élaborer la base de données qui devra dégager les variables pertinentes, quantitatives (résultats des élections, écarts de voix, etc.) et qualitatives (types d’irrégularités, moment où elles se produisent, paramètres du mode de scrutin, nombre de candidats et de listes, années des élections, paramètres plus politiques comme les nuances ou les sortants). Ce travail occupera la première année de la thèse au moins, en tant qu’il constitue un préalable indispensable à l’utilisation des autres techniques. La constitution d’une telle base de données sera au demeurant inédite.
3) Utilisation des différentes méthodologies d’intelligence artificielle pour la justice prédictive. Le doctorant devra ensuite, avec l’aide des chercheurs impliqués du LJK et du LIG, des ingénieurs et des stagiaires, tester les différentes techniques possibles (régressions statistiques logistiques et arbres de décisions) afin de produire des résultats, notamment par l’apprentissage de l’utilisation du logiciel Treensight, accessible pour un étudiant juriste (v. projet). Cela occupera la deuxième et une partie de la troisième année de la thèse. Il faudra enfin présenter les résultats de la recherche sous une forme intelligible par des juristes. La rédaction sera réalisée la dernière année de la thèse.
Restriction ou contraintes liées au poste :
Présence effective à Grenoble indispensable pour travailler en continu avec le directeur de thèse, les enseignants-chercheurs impliqués et les stagiaires, tous de l’Université Grenoble-Alpes
Profil recherché
Compétences attendues prioritaires : Compétences métier/savoir faire
Le projet suppose d’abord une très bonne connaissance du droit électoral et du contentieux électoral. La compréhension des décisions de justice constitue en effet un préalable à l’élaboration de la base de données du contentieux électoral et à la détermination de ses variables. Pour ce faire, l’étudiant devra être un étudiant juriste ayant suivi un cursus de droit public faisant une place significative au droit et contentieux des élections politiques, de préférence justifiant avoir suivi des enseignements en droit des élections spécifiquement.
En outre, dans la mesure où il devra travailler sur des questions de sciences dures en collaboration avec des spécialistes, il faudrait que l’étudiant ait des connaissances et/ou une appétence particulière pour les questions statistiques et informatiques. Des connaissances de base en matière de programmation (par ex. Python) seraient appréciées.
Capacité de mener une veille juridique, informationnelle et technologique.
Avoir de bonnes une méthodologie de recherche en droit
Très bonnes capacités rédactionnelles et de synthèse
Savoir être
Capacité à travailler en équipe.
Ouverture d’esprit
Adaptabilité
Rigueur
Expérience professionnelle souhaitée : ☒ débutant ☐ de 2 à 5 ans
Formation, diplôme :
Master 2 de droit public avec des éléments de spécialisation en droit électoral
● Critères de sélection
Qualité du cursus
Qualité de la motivation pour la réalisation du projet
Qualité de la formation préalable en droit électoral
Intérêt prononcé pour les problématiques scientifiques et informatiques
Qualité du projet professionnel
Informations générales
Le dossier de candidature est entièrement dématérialisé et sera envoyé sous format PDF à crj@univ-grenoble-alpes.fr au plus tard le 25 août 2022
Contact : crj@univ-grenoble-alpes.fr
Composition du dossier
Le dossier devra être composé de deux fichiers électroniques distincts.
Le premier fichier sera composé de :
La fiche de renseignement
Une lettre de motivation (une page)
Un CV détaillé faisant apparaître les mentions éventuellement obtenues par le candidat depuis le début de son cursus universitaire
Les relevés de notes de Licence, Master 1 et Master 2, ou titres équivalents
Le second fichier comportera un exemplaire numérique du mémoire de M2, en format pdf.
Attention :
Les dossiers incomplets, non signés, ne respectant ni la date de dépôt ni le nombre de pages demandées seront déclarés irrecevables et ne seront pas transmis aux membres du jury.
Les doctorants souhaitant enseigner dans le cadre de leur contrat doctoral sont invités à se rapprocher de la Faculté de droit de l’Université Grenoble Alpes (UGA) pour prendre connaissance de la procédure à suivre pour ce faire.
Contact pour les questions relatives aux fonctions :
Pour les aspects scientifiques :
Mail : romain.rambaud@univ-grenoble-alpes.fr
Pour les aspects administratifs :
Mail : claire.masouy@univ-grenoble-alpes.fr
Vous trouverez ici la fiche de poste en format Word :
Espérant que cette fiche de poste retiendra votre attention !
Conclusion
C’est donc avec un grand plaisir que nous nous préparons à mener ce projet de recherche fondamentale en équipe l’année prochaine !
C’est aussi l’occasion pour le blog du droit électoral de vous souhaiter à toutes et tous d’excellentes vacances ! On se retrouve en septembre !
Romain Rambaud