Elections législatives : le décret de dissolution et le décret de convocation des électeurs publiés au JO ! Vers une campagne en accéléré bénéficiant aux partis préparés et structurés [R. Rambaud]

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Nous l’indiquions ce matin : la difficulté posée par l’absence de publication au JO du décret de dissolution et du décret de convocation des électeurs. C’est chose faite avec une édition spéciale du JO du 20 juin 2024, aujourd’hui à 16h30 ! Ces éléments confirment ce que nous écrivions dans notre article ce matin, notamment avec une entrée en vigueur immédiate justifiée par l’urgence, afin de rester dans les délais prévus par la Constitution.

Ainsi, le décret du 9 juin 2024 prononce officiellement la dissolution de l’Assemblée Nationale.

Le décret n°2024-527 du 9 juin 2024 porte convocation des électeurs pour l’élection des députés à l’Assemblée Nationale. On remarque dans les visas qu’il se caractérise par l’urgence ce qui est confirmé par son article 15, qui prévoit qu’il sera publié au JO (le 10 donc) et entrera en vigueur immédiatement. Comme nous l’écrivions ce matin, cela nous semblait indispensable pour espérer rester dans les 20 jours prévus par l’article 12 de la Constitution et espérer convaincre le Conseil constitutionnel de la constitutionnalité de cette convocation. Nous renvoyons donc à notre article de ce matin sur ce point.

Ce décret confirme les dates : 30 juin pour le 1er tour et 7 juillet pour le 2nd.

Concernant les candidatures, il prévoit que « les déclarations de candidatures seront reçues par le représentant de l’Etat à partir du mercredi 12 et jusqu’au dimanche 16 juin 2024 à 18 heures (heure légale locale). Pour le second tour, les déclarations de candidatures seront déposées à partir de la proclamation des résultats par la commission de recensement général des votes et jusqu’au mardi 2 juillet 2024 à 18 heures (heure légale locale) ». La publication de la liste des candidats dont la déclaration de candidature a été définitivement enregistrée et de leurs remplaçants est arrêtée et publiée par le préfet, pour le premier tour, au plus tard le deuxième vendredi précédant la date du scrutin soit le 21 juin et, pour le second tour, le lendemain de la date limite fixée pour le dépôt des candidatures, soit le 3 juillet. Comme nous l’avions indiqué dimanche, en application de la jurisprudence du Conseil constitutionnel de 1981 et 1988, ces dispositions prévalent sur le code électoral.

Concernant la campagne électorale, elle sera ouverte le lundi 17 juin 2024 à zéro heure. A cette date seront installées les commissions prévues à l’article L. 166 du code électoral. 15 jours de campagne officielle, c’est la solution classique.

L’élection aura lieu à partir des listes électorales arrêtés à la date du décret sans préjudice de l’application des exceptions classiques relatives aux recours en justice devant le tribunal judiciaire et les exceptions classiques (fonctionnaires, militaires, etc.).

Le décret prévoit aussi le régime de la liste des partis politiques souhaitant bénéficier du financement public, l’arrêté établissant la liste étant publié au 12 juin, la demande pour figurer sur cette liste devant être faite le 11 juin à 20h au plus tard. Les partis devront déposer la liste de leurs candidats le 21 juin 2024.

Par ailleurs le décret prévoit le régime de la campagne audiovisuelle officielle prévu à l’article L. 167-1. Chaque parti ou groupement politique adresse sa demande au ministre de l’intérieur, par voie dématérialisée, au plus tard le jeudi 13 juin 2024 à 18 heures. La liste des partis ou groupements politiques ayant transmis leur demande est publiée sur le site internet de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique au plus tard le jeudi 13 juin 2024 à minuit. La liste des partis ou groupements politiques habilités à participer à la campagne audiovisuelle est publiée au Journal officiel de la République française au plus tard le deuxième lundi qui précède le premier tour de scrutin. Le temps sera attribué en fonction des groupes parlementaires et de la représentativité des partis non représentés.

Il existe également des dispositions pour faciliter les procurations. En effet d’après ce texte dérogeant aux règles normales, l’électeur qui recourt à la télé-procédure pour faire établir une procuration est dispensé de se présenter en personne devant les autorités mentionnées par ces articles s’il atteste de son identité à l’aide d’un moyen d’identification électronique présumé fiable et certifié. Lorsque l’électeur fait usage de ce moyen d’identification, la procuration est établie électroniquement par le ministre de l’intérieur, par dérogation aux septième et huitième alinéas du II de l’article R. 75 du code électoral. Le lieu d’établissement de la procuration est celui où l’électeur atteste sur l’honneur se trouver au moment de sa demande. Pour l’application de l’article R. 76-1 du même code, les nom, prénom et qualité de l’autorité qui a établi la procuration sont remplacés par la mention : « France Identité ». Cela veut dire que dans ce cas de figure, la procuration deviendrait 100 % numérique.

Bien entendu, ces dispositions d’urgence seront profitables aux partis organisés et structurés qui pourront, aussi rapidement, répondre aux sollicitations du ministère. Cela pourrait donner du grain à moudre à ceux qui souhaiteraient contester ce décret, comme cela est possible en vertu de la jurisprudence Delmas de 1981 du Conseil constitutionnel confirmée en 1988. Certains y verront en tout état de cause une volonté du pouvoir en ce sens. En effet, on rappelle que dans sa jurisprudence Delmas, le Conseil constitutionnel annonce exercer aussi un contrôle de la liberté et de la sincérité du scrutin dans ce cadre.

A ces questions s’ajouterait celle de la date, même si le Gouvernement a éloigné le danger en procédant, comme nous le suggérions ce matin, à la publication en urgence avec entrée en vigueur immédiate du décret, même si le Conseil constitutionnel en définitive tranchera.

Un rythme endiablé, donc, qui commence à se mettre en place !

Romain Rambaud