Elle était devenue beaucoup moins probable depuis l’inversion du calendrier électoral de 2001, tout en restant une épée de Damoclès de la vie politique française. Elle survient finalement dès les résultats européennes de 2024, donnant à ces élections européennes une portée nationale considérable. Le Président de la République a annoncé, après avoir consulté le Premier ministre et les présidents des Assemblées, dissoudre l’Assemblée Nationale.
L’article 12 de la Constitution prévoyant que « Le Président de la République peut, après consultation du Premier ministre et des présidents des assemblées, prononcer la dissolution de l’Assemblée nationale. Les élections générales ont lieu vingt jours au moins et quarante jours au plus après la dissolution », les élections législatives se tiendront les 30 juin et 7 juillet et le décret de convocation va être immédiatement signé par le Président de la République et sera publié au Journal Officiel. La XVIème législature prend donc fin.
Il est peu dire qu’une telle décision est spectaculaire dans le contexte, notamment au regard du score de la majorité aux élections européennes et de la situation déjà difficile des législatives de 2022. De quoi parier sur une défaite et la quatrième « cohabitation » de la Vème République ? Quelle serait la configuration ? Un Premier Ministre minoritaire ? La formation de coalitions inédites ? Juste avant les Jeux olympiques de Paris ?
Le fait est d’autant plus étonnant que le temps n’a pas été mis à profit, dans les années précédentes, alors qu’il aurait pu l’être pour réformer le mode de scrutin. C’est donc un véritable coup de poker qui se joue alors qu’il est très difficile, dans le contexte actuel et pour ce premier découplage des élections législatives de la présidentielle depuis 2002, ce qui pourrait bien advenir.
Une actualité électorale particulièrement chargée, donc, à suivre.
Sur le plan du droit électoral, il faut attendre ici les dispositions du décret de convocation. En effet ici les dispositions de la Constitution prévalent sur celles prévues dans le Code électoral par exemple en matière de dates de dépôt de candidatures ou de campagne électorale. Sur ce point le Conseil constitutionnel a déjà eu l’occasion de juger, dans sa décision Cons. const., 11 juin 1981, n° 81-1 ELEC, Delmas, que les « dispositions de nature constitutionnelle prévalent nécessairement, en ce qui regarde les délais assignés au déroulement de la campagne électorale et au dépôt des candidatures, sur les dispositions législatives du code électoral, qui d’ailleurs ne concernent point le cas d’élections consécutives à la dissolution de l’Assemblée nationale ; que les termes des décrets du 22 mai 1981 ne contreviennent pas aux dispositions de l’article 12 de la Constitution et ne comportent pas de prescriptions de nature à porter atteinte à la liberté et à la sincérité du scrutin ».
Il a confirmé cette solution dans une décision du 4 juin 1988, n° 88-5 ELEC, Gallienne et autres… Il avait été à l’époque saisi notamment, par… Jean-Marie Le Pen. Pas certain que la fille fasse cette fois la même démarche contentieuse.
Romain Rambaud