Chers lecteurs, vous trouverez ci-dessous le guide et corrigé de l’escape game du bureau de vote, jeu classique désormais s’étant tenu à Grenoble le 4 octobre pour la nuit du droit, piloté cette année par Emma Gavasso !
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Pitch de l’escape game du bureau de vote 2022 : la dissolution de l’Assemblée Nationale !
D’après les informations exclusives du Master Droit des collectivités territoriales, le Président de la République a décidé de dissoudre l’Assemblée Nationale !
De nouvelles élections législatives ont eu lieu le mardi 4 octobre 2022 au Tribunal Judiciaire de Grenoble, à l’occasion de l’escape game du bureau de vote organisé par les étudiants du Master Droit des collectivités territoriales pour la nuit du droit. Des candidats se sont présentés à Grenoble !
Par groupes de 5, 6, 7 personnes, les participants devaient entrer dans le bureau de vote et trouver les 14 irrégularités cachées dans la salle !
L’escape game du bureau de vote, sans interruption de 17h à 22h !
Le corrigé :
Ce corrigé, avec toutes les irrégularités, sera utile pour tous les participants mais aussi pour les curieux ! Il y en avait 14 !
Storytelling
1. Dès le départ, il y a une énorme irrégularité par la violation de l’article 12 de la Constitution avec le non-respect des délais constitutionnels (dissolution de l’Assemblée Nationale le 28 septembre pour des élections le 4 octobre). L’article 12 de la Constitution dispose que « Le Président de la République peut, après consultation du Premier ministre et des Présidents des Assemblées, prononcer la dissolution de l’Assemblée nationale. Les élections générales ont lieu vingt jours au moins et quarante jours au plus après la dissolution ». Par ailleurs des élections qui ont lieu un mardi, ce n’est pas banal ! Cette irrégularité était dure à trouver, mais nos étudiants à l’accueil ont, beaucoup, aidé !
À l’extérieur à l’entrée du bureau de vote :
2.Un délégué d’un candidat attend devant le bureau de vote en promouvant son candidat et en donnant les prospectus de son candidat : illégal. En vertu de l’article L. L47 A du code électoral, « La campagne électorale est ouverte à partir du deuxième lundi qui précède la date du scrutin et prend fin la veille du scrutin à zéro heure. En cas de second tour, la campagne électorale est ouverte le lendemain du premier tour et prend fin la veille du scrutin à zéro heure ». Cela interdit les actions de propagande le jour du scrutin. Par ailleurs une propagande devant un bureau de vote peut selon les cas être considérée comme une pression pesant sur les électeurs.
À l’intérieur, dans la salle :
3. Un électeur rentre dans le bureau de vote et s’énerve, parle de politique et demande d’inscrire au procès-verbal l’inconstitutionnalité liée aux dates des élections puis procède à des actions violentes à l’intérieur du bureau de vote : illégal parce que contraire au principe de neutralité du bureau de vote et parce que troublant l’ordre public au sein du bureau de vote.
4. Des électeurs viennent voter plusieurs fois en se déguisant, illégal parce que évidemment on ne peut voter qu’une seule fois !
5. Une croix chrétienne collée sur un mur de la salle : illégal, parce que le bureau de vote comme tout service public doit respecter le principe de la neutralité religieuse.
À l’intérieur, sur la table de décharge :
6. Des bulletins qui ne sont manifestement pas du même grammage (papier beaucoup plus épais). Illégal car les bulletins doivent en principe respecter les mêmes règles de grammage, car sinon cela permettrait d’identifier les électeurs et porterait atteinte au principe de secret du vote, et sont illégaux les bulletins d’un format manifestement différent de la règle.
7. Le bulletin d’un candidat est manquant : illégal, la circulaire sur les opérations électorales disposant que « sur la table de décharge sont déposés:
(…) les bulletins de vote ». Dans la pratique, il peut arriver que des bulletins manquent si les candidats ne les ont pas envoyé aux instances ou apportés le jour J, mais ici, rien ne l’indiquait ! L’absence du bulletin d’un candidat est donc problématique.
8. Il y a un drapeau français sur un des bulletins de vote : c’est illégal. Depuis un décret de 2007, il est précisé que les bulletins doivent être imprimés « en une seule couleur en papier blanc », ce qui exclut désormais l’utilisation des trois couleurs du drapeau national (CE, El. Mun. de Saint-Gervais-les-Bains, 14 janv. 2002, n°234640)
9. Personne ne vérifie les cartes d’identité : illégal, la circulaire spécifique aux élections législatives de 2022 disposant que « L’identité de chaque électeur doit être contrôlée à l’entrée du bureau de vote. ». Par ailleurs l’identité doit être vérifiée au moment du vote par le biais d’un document officiel dans les communes de 1000 habitants et plus comme Grenoble !
10. Il y a deux bulletins avec la photo d’Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon : illégal, l’article L. 52-3 du code électoral disposant que les
bulletins de vote ne peuvent pas comporter (…) « 2° La photographie ou la représentation de toute personne, à l’exception de la photographie ou de la représentation du ou des candidats à l’élection concernée et, pour la Ville de Paris et les communes de Marseille et de Lyon, de la photographie ou de la représentation du candidat désigné comme devant présider l’organe délibérant concerné par le scrutin »
A l’intérieur, sur l’isoloir :
11. Le règlement de l’Assemblée Nationale collé sur l’isoloir à la place de la circulaire générale sur les opérations électorales et la circulaire spécifique des élections législatives
12. L’isoloir et l’urne sont inadaptés pour les personnes en situation de handicap : la circulaire spécifique aux élections législatives 2022 dispose pourtant que « En application de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, il vous revient d’aménager les locaux de vote afin de les rendre accessibles aux personnes handicapées. »
A l’intérieur, sur la table de vote :
13. Le président ou l’assesseur met lui-même le bulletin dans l’urne au moment du vote. C’est illégal, l’article L. 62 du code électoral disposant que l’électeur « fait ensuite constater au président qu’il n’est porteur que d’une seule enveloppe ; le président le constate sans toucher l’enveloppe, que l’électeur introduit lui-même dans l’urne ».
14. Un assesseur ouvre l’urne et retire des bulletins. C’est évidemment illégal. En cas de problème, il faut l’indiquer au PV, mais bien sûr on ne peut pas ouvrir l’urne et retirer des bulletins !
Sur la table de dépouillement (jeu final) :
Une enveloppe vide (blanc)
Une enveloppe avec un bulletin blanc (blanc)
Une enveloppe avec deux bulletins identiques (valide)
Une enveloppe avec deux bulletins de candidats différents (nul)
Une enveloppe avec un bulletin injurieux (nul)
Une enveloppe avec un bulletin déchiré au milieu (nul)
Une enveloppe avec un bulletin comportant le nom d’un non-candidat (nul)
Une enveloppe avec le nom et la qualité du suppléant plus gros que celui du titulaire (nul). L’article R. 103 du code électoral dispose que sont nuls les bulletins imprimés sur lesquels le nom du remplaçant ne figure pas en caractères de moindres dimensions que celui du candidat.
Une enveloppe avec un bulletin comportant le nom d’un candidat et du suppléant (valide)
Une enveloppe avec un bulletin comportant le nom d’un candidat mais pas du suppléant (nul)
Une autre enveloppe avec un bulletin comportant le nom d’un candidat et du suppléant (valide)
Une enveloppe avec un bulletin multicolore (nul)
Conclusion
Pour sa troisième édition, l’escape game du bureau de vote a été un véritable succès. Celui-ci aura été différent des autres années. En effet, les étudiants se sont organisés en autonomie suite à l’absence de Monsieur Romain Rambaud, celui-ci participant à l’escape game organisé par le Tribunal administratif de Lyon. Cette organisation a été une véritable réussite grâce à l’investissement de tous les étudiants !
Malgré son changement d’emplacement, l’escape game a remporté un grand succès, notamment grâce à la communication effectuée en amont. Cette année, les étudiants ont participé à la communication de cet évènement. C’est ainsi que notre journaliste favorite nous a annoncé, en exclusivité, la dissolution de l’Assemblée Nationale. Mais aussi, grâce aux réseaux sociaux, certains candidats ont eu l’opportunité de vous exposer leur programme, une communication inédite jusqu’à présent. Les étudiants ont parfaitement joué le rôle des candidats et de la journaliste. Merci à eux !
Les irrégularités n’étaient pas évidentes à trouver toutefois cinq équipes ont relevé le défi haut la main. Malheureusement, elles ont toutes buté à la terrible table de dépouillement…Officiellement il n’y a donc pas eu de gagnant.e.s cette année. Tout de même un grand bravo à tous !
Emma Gavasso
Emma est actuellement étudiante en Master 2 Droit des collectivités territoriales – Direction et conseil de l’action publique. En parallèle du master, elle suit les cours du diplôme universitaire de droit de l’environnement proposé par la Faculté de droit de l’Université Grenoble Alpes. Très intéressée par le droit de l’environnement, elle a rédigé un rapport de recherche sur la réutilisation des eaux usées en M1. Au mois d’août dernier elle a travaillé au service des Ressources Humaines à la mairie de Saint-Marcellin, ce qui lui a permis de découvrir le fonctionnement d’une administration territoriale.
Pour l’avenir, Emma souhaiterait travailler dans le domaine du droit de l’environnement ou dans la voie du contentieux administratif. Nul doute qu’elle saura dans ces domaines être proactive, qualité dont elle a fait la démonstration et qui est absolument essentielle dans le monde professionnel !