Dans un article écrit pour le site internet de « Legal Checking » Les Surligneurs, nous avons réalisé un surlignage sur le fait que l’Oeil du Mans, site local d’information et d’opinion, effectue sur sa page Facebook des sondages afin de tester des intentions de vote pour les élections municipales. Nous renvoyons au site des Surligneurs pour une analyse complète de la situation et du cas d’espèce.
Plus généralement, il en résulte une question très intéressante pour le droit électoral et le droit des sondages électoraux. En effet, l’utilisation de l’application « sondage » de Facebook pour réaliser des enquêtes d’intentions de vote semble problématique à double titre. D’une part, parce que comme la commission des sondages l’a souligné dans un communiqué du 30 janvier 2020, ces enquêtes n’ont aucune valeur faute de présenter des garanties de scientificité suffisantes. Mais aussi, d’autre part, parce que dans ce cas de figure, et quelle que soit la dénomination utilisée par les personnes qui utilisent l’application, Facebook fait apparaître le mot « sondage » sur sa page web, comme le montre par exemple l’illustration ci-dessous.
Or, en vertu de l’article de 12 n° 77-808 du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d’opinion, «le fait d’utiliser le mot : “sondage” pour des enquêtes portant sur des sujets liés, de manière directe ou indirecte, au débat électoral et qui ne répondent pas à la définition du sondage », est puni d’une amende de 75 000 Euros. Selon la même loi (article 1er), constitue un sondage « une enquête statistique visant à donner une indication quantitative, à une date déterminée, des opinions, souhaits, attitudes ou comportements d’une population par l’interrogation d’un échantillon ». Cela signifie donc que l’utilisation de la fonctionnalité « sondage » de Facebook pour réaliser des enquêtes ne présentant pas cette nature conduit leurs auteurs à commettre une infraction à la loi de 1977 dans la mesure où le mot « sondage » se trouve automatiquement utilisé par Facebook. Quoiqu’indirecte, parce que liée à une fonctionnalité de Facebook, l’incrimination pourrait être caractérisée.
Une situation qui devrait conduire soit à l’arrêt de l’utilisation de l’application « sondage » de Facebook pour poser des questions d’intentions de vote, soit à ce que Facebook n’utilise plus le mot « sondage ». En tout état de cause, cet exemple montre que le problème posé par les « faux sondages » n’est pas réglé et que sur ce point, la solution « pénale » concernant l’utilisation du mot « sondage » proposée par la loi de 1977 modifiée en ce sens en 2016 est très insatisfaisante, comme nous avions pu le souligner à l’époque. A suivre !
Romain Rambaud