Rapport fait au nom de la Commission d’enquête concernant l’organisation des élections en France : un tour d’horizon utile quoique politisé des problématiques du droit électoral aujourd’hui en France [R. Rambaud]

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Le rapport d’enquête parlementaire sur l’organisation des élections en France (N° 1479, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 28 mai 2025), issu du travail de la commission d’enquête présidée par M. Thomas Cazenave (Renaissance) et rapporté par M. Antoine Léaument (LFI), constitue une contribution importante au droit électoral, quand bien même elle n’est pas exempte de toute dimension politique, la presse ayant par exemple retenu que La France Insoumise avait profité de ce rapport pour mener une charge contre les instituts de sondages ; ou que la Commission avait rendu un rapport « gâché par les brouilles politiques » selon La Croix. Il s’agit sans doute d’un problème qui se développera toujours davantage avec le nouveau rôle central du Parlement et dans ce cadre le renforcement de l’importance des commissions d’enquête, mais c’est un sujet que l’on n’abrodera ici que brièvement.

Le rapport s’inscrit dans un contexte de défis croissants pour la démocratie contemporaine : abstentionnisme, défiance envers les institutions, menaces numériques et logistiques. L’objectif de la commission était d’établir un diagnostic exhaustif des procédures électorales en France, de la gestion des listes électorales à la proclamation des résultats, en passant par la campagne, le vote et le dépouillement. Le rapport met en évidence une structure robuste mais vieillissante, qui nécessite des adaptations pour faire face aux évolutions technologiques et sociétales, croisant ainsi un très grand nombre des sujets d’actualité du droit électoral.

Ce rapport de 522 pages est le fruit d’un travail approfondi mené par une commission d’enquête transpartisane, qui met en lumière les forces et les faiblesses du système électoral français et formule des propositions concrètes pour son amélioration. La commission d’enquête concernant l’organisation des élections en France a réalisé un travail intéressant d’une durée de 6 mois. 40 auditions ont permis d’entendre près de 120 personnes : des représentants des ministères, des autorités de régulation, des chercheurs (mais peu en droit électoral et pas l’auteur de ses lignes), des magistrats, des journalistes, des instituts de sondage, des responsables de plateformes numériques, des élus locaux, des membres de la société civile, ainsi que plusieurs acteurs du débat public. Le résultat produit est intéressant même si fourre-tout et parfois inégal.

Ce rapport n’étant toutefois qu’un rapport de commission d’enquête, on peut noter une forme de politisation – et de vote sur un certain nombre de sujets – qui ont pu passer en l’état (sous réserve de ce qui sera dit ci-dessous sur la division inhabituelle en trois parties de ce rapport d’enquête) mais qui n’auraient guère prospéré dans le cadre d’un travail législatif classique. Le rapporteur de la Commission, Antoine Léaument, est ainsi un élu insoumis aux positions bien tranchées, ce qui explique un certain nombre de choses, par exemple la dernière partie du rapport très critique vis-à-vis des sondages ou encore les dernières recommandations du rapporteur, de créer un droit au référendum d’initiative citoyenne pour proposer une loi, abroger une loi, changer la Constitution ou révoquer un élu en cours de mandat, du conseiller municipal au président de la République (recommandation n°114) ou de réunir une assemblée constituante chargée de rédiger la Constitution d’une 6e République plus démocratique et soumettre le projet de Constitution proposé par cette Assemblée au peuple français par référendum (recommandation n°115). Son comportement a par ailleurs été très critiqué pour d’autres groupes politiques en aval des travaux, au moment de la rédaction du rapport (v. dernière partie).

C’est la raison pour laquelle, de façon inhabituelle, le rapport de la commission d’enquête est divisé en trois parties distinctes: la position de son président, Thomas Cazenave (Renaissance), celle du rapporteur Antoine Léaument (LFI) et enfin celle des autres groupes participant aux travaux. Le journal La Croix note ainsi : « Le format de ce rapport pose toutefois question, puisqu’il se décompose en trois parties distinctes : celle d’Antoine Léaument, le rapporteur (La France insoumise), celle du président Thomas Cazenave (Renaissance), et celle des autres élus ayant participé à cette commission. Un « statut particulier », comme en convient Thomas Cazenave. « J’ai fait acter ces trois parties pour pouvoir publier ce rapport, malgré les positions personnelles prises par M. Léaument. Il n’a pas cherché à écrire un document pouvant rassembler le plus grand nombre de députés, on ne peut donc pas dire que ce soit le rapport de notre commission », assure-t-il. »... même s’il a été voté, selon les trois parties distinctes donc.

Eu regard de la différence de ton et d’approche sur chacun de ces points du rapport de la commission d’enquête, on les étudiera successivement avant de conclure. Il n’en demeure pas moins en effet que ce document reste très utile comme point d’étape global du droit électoral français au regard des problématiques contemporaines.

Les propositions du Président de la Commission d’enquête

Pour ce qui le concerne, le Président de la Commisison d’enquête se contente de faire six recommandations, à comparer aux… 115 du rapporteur, plutôt techniques et consensuelles.

  1. Encadrer les radiations pour perte d’attache communale en fixant un délai minimal avant un scrutin et en garantissant une information claire et traçable aux électeurs concernés.
  2. Enrichir le Répertoire électoral unique (REU) en y intégrant des coordonnées numériques (email, téléphone) afin de faciliter l’information des électeurs et, à terme, la dématérialisation de la propagande électorale si l’électeur le souhaite.
  3. Lever le moratoire sur les machines à voter en autorisant les communes qui le souhaitent à les utiliser, sous réserve d’un encadrement technique rigoureux et actualisé.
  4. Refuser le vote électronique à distance à l’échelle nationale, en raison des risques accrus de contestation du scrutin et de l’impossibilité d’un recomptage.
  5. Renforcer la réponse institutionnelle face aux ingérences étrangères, en augmentant les moyens de Viginum, en améliorant la coordination entre services de l’État et en exigeant davantage de transparence des plateformes numériques.
  6. Poursuivre les travaux parlementaires sur le financement para-politique, afin d’évaluer s’il convient de faire évoluer le droit face à l’émergence de nouveaux acteurs politiques structurés hors des partis (on reviendra en particulier sur ce dernier point ci-dessous, concernant le projet dit Périclès)

Le corps du rapport : les nombreuses propositions du rapporteur

De nombreuses pistes se trouvent suggérées, certaines techniques, d’autres plus politiques, mais toutes s’inscrivent dans l’évolution de l’état de l’art du droit électoral sur ce genre de questions. La lecture du document reste donc très utile, même si on pourra regretter certains passages très politisés sur les listes électorales ou les sondages.

La Gestion des Listes Électorales : entre Modernisation et Fiabilisation

Le rapporteur identifie plusieurs points d’amélioration concernant la gestion des listes électorales.

Il dresse un bilan globalement positif du Répertoire Électoral Unique (REU). Le rapport salue les progrès en matière de simplification des inscriptions et de réduction des doublons ou des radiations tardives. La possibilité de s’inscrire en ligne et jusqu’à six semaines avant le scrutin est ainsi considéré comme une avancée démocratique majeure. Le rappport souligne cependant que le REU n’a pas encore atteint sa pleine maturité. Des dysfonctionnements persistent, notamment en ce qui concerne la mise à jour des changements d’adresse intra-communaux ou les radiations des personnes décédées, parfois tardives. La question des « mal inscrits » ou des « non-inscrits » demeure un défi, particulièrement pour les jeunes et les populations mobiles.

Les propositions clés sont alors les suivantes : une interopérabilité accrue, avec le renforcement de l’interconnexion entre le REU et d’autres bases de données administratives (fisc, état civil, sécurité sociale) pour une mise à jour plus dynamique et automatique. Des campagnes d’Inscriptions actives, à savoir mener des campagnes nationales et locales plus ciblées pour inciter à l’inscription, notamment des primo-votants. La clarification des procédures, notamment mieux communiquer sur les modalités d’inscription et de vérification pour les citoyens.

Les recommandations du rapporteur sont sur ce sujet les suivantes :

Recommandation n° 1: Mettre en place en urgence un moratoire des radiations pour perte d’attache communale pour éviter de priver du droit de vote nos compatriotes qui sont touchés par ces radiations.

Recommandation n° 2: À terme, interdire définitivement les radiations pour perte d’attache communale via la mise en place d’un système d’inscription automatique sur les listes électorales permettant d’éviter les radiations abusives.

Recommandation n° 3 : Mettre en place un plan de contact national des personnes radiées des listes électorales pour perte d’attache communale, en lien avec l’Insee, afin de vérifier leur situation électorale et de s’assurer qu’elles puissent se réinscrire au plus vite sur les listes électorales.

Recommandation n° 4 : Abaisser à 16 ans le droit de vote et le seuil d’inscription automatique sur les listes électorales.

Recommandation n° 5 : Renforcer, dès l’entrée dans la vie scolaire, l’information électorale et l’éducation aux enjeux du vote et de la citoyenneté.

Recommandation n° 6 : Accorder le droit de vote et d’éligibilité aux élections municipales aux étrangers non ressortissants de l’Union européenne résidant en France.

Recommandation n° 7. Confier explicitement aux communes une mission de diffusion locale de l’information électorale, en complément des campagnes nationales, en leur apportant les moyens nécessaires pour organiser des campagnes de proximité (courriers individualisés, affichages ciblés et permanences d’information), afin d’assurer à chaque électeur une connaissance précise de son bureau de vote, des horaires de scrutin et des modalités pratiques de participation.

Recommandation n° 8 : Expérimenter l’utilisation du dispositif FR-Alert pour rappeler aux citoyens les échéances électorales importantes, telles que les dates limites d’inscription sur les listes électorales ou les jours de scrutin.

Recommandation n° 9 : Atteindre l’objectif « 100 % d’inscrits, 0 % de mal-inscrits » sur les listes électorales par la mise en place d’un dispositif d’inscription automatisée basé sur le répertoire électoral unique, le dispositif FranceConnect et les autres déclarations administratives (déclarations d’impôts, assurance maladie, CAF…).

Recommandation n° 10 : Confier au gestionnaire de la liste électorale la mission d’informer systématiquement les électeurs des décisions de radiation et des modalités de réinscription, par tous les canaux disponibles, y compris par voie électronique et/ou téléphonique lorsque cela est possible.

Recommandation n° 11 : Mettre en oeuvre un téléservice permettant la mise à jour des adresses électroniques et des numéros de téléphone des électeurs et envisager, sous réserve d’évolutions juridiques, la récupération de ces données auprès d’autres administrations, en garantissant des procédures de vérification robustes.

Recommandation n° 12 : Garantir le maintien automatique de l’inscription électorale en cas de déménagement intra-communal.

Recommandation n° 13 : Interdire toute radiation pour perte d’attache communale dans le cadre d’un dispositif d’inscription automatique sur les listes électorales.
Recommandation n° 14 : Suspendre les radiations hors les cas de décès entre la date limite d’inscription en vue d’une élection nationale et la tenue de ce scrutin, afin de prévenir toute exclusion sans possibilité de réinscription.

Recommandation n° 15 : Mettre en place le vote obligatoire à l’âge de 18 ans, et reconnaître pleinement le vote blanc en le décomptant séparément lors des scrutins. Engager une réflexion sur l’opportunité d’instaurer des seuils pouvant affecter la validité des élections.

Recommandation n° 16 : Garantir le caractère férié et chômé de la journée électorale du dimanche, en excluant expressément l’application des régimes dérogatoires au repos dominical, afin de renforcer le suffrage et d’en faciliter l’exercice effectif par l’ensemble des électeurs.

Le Vote des Français de l’Étranger : une critique sur les dysfonctionnements

Les Français établis hors de France bénéficient de modalités de vote distinctes (vote à l’urne dans les consulats, par correspondance électronique sous certaines conditions, par internet). Le rapport pointe la complexité du système et le faible taux de participation. Le vote par internet, bien que pratique, soulève des questions de cybersécurité et de transparence, comme l’ont montré certaines annulations d’élections en 2022 et certaines suspensions passées.

Les propositions sont alors les suivantes : simplifier les procédures d’inscription, faciliter l’inscription sur les listes électorales consulaires et la mise à jour des données, renforcer la Sécurité du Vote Électronique (Investir dans des systèmes de vote électronique plus robustes et transparents, avec des audits indépendants réguliers). Concernant le vote par correspondance, le rapporteur suggère d’étudier la faisabilité d’un vote par correspondance plus large, tout en garantissant son intégrité, qui passerait par d’autres voies que le vote électronique.

Sur ce point les recommandations du rapporteur sont les suivantes :

Recommandation n° 57 : Poursuivre le développement de l’authentification numérique souveraine pour les opérations de vote en ligne des Français de l’étranger et envisager sa possibilité comme une option supplémentaire en parallèle ou en complément de l’authentification par SMS.

Recommandation n° 58 : Développer une alternative simple de double authentification par la mise en place d’une application souveraine de génération de code aléatoire en complément de l’authentification numérique souveraine et du SMS.

Recommandation n° 59 : Développer rapidement une solution souveraine et internalisée dans les administrations de l’État pour les opérations de vote en ligne des Français de l’étranger afin de ne pas dépendre de prestataires externes sur un sujet aussi crucial que celui de l’exercice de la souveraineté du peuple.

Recommandation n° 60 : Mettre en place un comité de surveillance des outils et opérations de vote en ligne des Français de l’étranger, comportant au moins un représentant de chaque groupe politique de l’Assemblée nationale, pouvant être assisté de ses équipes techniques.

Recommandation n° 61 : Envoyer la propagande électorale concernant les Français établis hors de France par voie électronique en addition et en complément de l’envoi de la propagande électorale par courrier et ne renoncer en aucun cas à cette dernière méthode.

Recommandation n° 62 : Travailler à une solution complémentaire d’envoi par SMS (avec un lien d’accès fiable et sécurisé) de la propagande électorale concernant les Français établis hors de France.

Recommandation n° 63 : Conserver la possibilité pour les Français établis hors de France de voter par correspondance.

L’Organisation Matérielle du Scrutin : Logistique, Sécurité et Accessibilité

Le rapport rappelle sur le ce point le rôle prépondérant des communes . Les mairies sont la cheville ouvrière de l’organisation des élections, gérant les bureaux de vote, les urnes, les isoloirs, les assesseurs, etc. Le rapport souligne l’engagement des élus et agents communaux. Il pointe cependant un manque de moyens et de formation pour certaines communes, notamment les plus petites, entraînant des disparités dans l’organisation et la qualité de l’accueil des électeurs. Le renouvellement des matériels (urnes, isoloirs) est parfois insuffisant.

Concernant l’accessibilité pour les personnes en situation de handicap, le rapport constate que de nombreux bureaux de vote ne sont pas entièrement accessibles aux PMR. Les personnes en situation de handicap (visuel, auditif, cognitif) rencontrent également des difficultés spécifiques. Pour les personnes âgées ou dépendantes, le vote par procuration, bien qu’utile, ne répond pas toujours aux besoins des personnes âgées ou dépendantes ne pouvant se déplacer.

Le rapport propose alors un audit d’accessibilité des bureaux de vote, desensibiliser et former les assesseurs à l’accompagnement des électeurs en situation de handicap, d’étudier des dispositifs de vote à domicile pour les personnes les plus dépendantes, sous strict encadrement pour éviter toute fraude. D’améliorer la communication sur les options de vote pour les personnes en situation de handicap (par exemple, urnes accessibles, modèles de bulletins en gros caractères ou braille si pertinents).

Plus généralement, le rappport prénoise un soutien financier et technique Accru : accorder des dotations spécifiques aux communes pour l’organisation des élections et mettre à disposition des outils et guides pratiques plus harmonisés.

Concernant le dépouillement, la commission observe une grande hétérogénéité dans les pratiques de dépouillement entre les bureaux de vote, notamment en ce qui concerne la rigueur de la tenue des feuilles de pointage et la composition des équipes. Le caractère parfois fastidieux de la tâche peut entraîner des erreurs. Le rapport souligne les difficultés croissantes à trouver suffisamment d’assesseurs volontaires, qui sont pourtant essentiels au bon déroulement des opérations. Le rapport propose d’élaborer des guides de dépouillement plus précis et contraignants, avec des fiches de synthèse uniformisées pour la remontée des résultats ; de mieux former les présidents de bureaux de vote et les assesseurs sur les règles du dépouillement et sur les motifs de nullité des bulletins ; d’étudier des pistes pour valoriser l’engagement des assesseurs (petite indemnité symbolique, reconnaissance civique, facilitation des démarches pour les fonctionnaires et salariés). Enfin, bien que controversé, le rapport n’écarte pas l’expérimentation du comptage électronique des bulletins pour les très grands bureaux, mais insiste sur la nécessité de garanties absolues de transparence, de traçabilité et de contrôle citoyen (impression de tickets, audit indépendant). Cette proposition doit être maniée avec une extrême prudence compte tenu des enjeux de confiance.

Sur ce point les recommandations du rapporteur sont notamment les suivantes :

Recommandation n° 18 : Organiser, via le ministère de l’Intérieur, un audit national de la présence et de la disponibilité du matériel de base nécessaire aux scrutins (urnes, isoloirs, panneaux électoraux…) dans toutes les communes de France.

Recommandation n° 19 : S’assurer du respect de la loi actuelle sur les panneaux d’affichage libre et engager une modification des articles R. 581-2 et R. 581-3 du code de l’environnement pour augmenter à la fois la surface de l’affichage libre dans les communes et le maillage des panneaux qui le rendent possible, en accompagnant financièrement les communes dans leur déploiement.

Recommandation n° 20 : Anticiper les enjeux logistiques d’une éventuelle nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale et prévoir le cas où celle-ci interviendrait aux mois de juillet ou août, afin de réduire les difficultés des communes en matière d’organisation des élections.

Recommandation n° 21 : Lancer une campagne nationale d’information sur les élections pour inciter nos concitoyens à participer à la tenue des bureaux de vote et renforcer ainsi la fiabilité et la sincérité des scrutins par l’implication civique.

Recommandation n° 33 : Proposer une solution de sortie du moratoire relatif aux machines à voter en s’appuyant sur les travaux du groupe de travail dédié mis en place par le ministère de l’Intérieur.

Recommandation n° 34 : Prioriser l’impératif de préservation de la sincérité du scrutin sur les avantages pratiques offerts par les machines à voter.

Recommandation n° 35 : Engager une démarche renforcée d’accompagnement des services de l’État à destination des communes rencontrant des difficultés pour recruter des assesseurs.

Recommandation n° 36 : Assurer une meilleure prise en charge par l’État des dépenses engagées par les communes lors de l’organisation des élections.

Recommandation n° 37 : Renforcer la transparence et la consolidation du coût des élections par le ministère de l’Intérieur.

Recommandation n° 38 : Maintenir absolument l’envoi de la propagande électorale par voie postale et ouvrir en complément l’envoi de propagande dématérialisée par mail et SMS pris en charge par les préfectures, au minimum pour les élections nationales (présidentielle, européenne et législatives).

Le vote par procuration

Concernant le vote par procuration, le rapport appelle à une simplification et à davantage de fiabilité.

Réformes Récentes : Les réformes visant à permettre à un électeur de donner procuration à un autre sans condition de résidence dans la même commune sont saluées. La dématérialisation partielle de la procédure est une avancée.

Cependant le rapport rappelle les files d’attente aux guichets, les délais de traitement variables et les problèmes liés à la vérification d’identité. Le risque de fraude, même s’il reste marginal, est une préoccupation.

Le rapport propose de poursuivre la dématérialisation complète du processus de procuration, en utilisant des identités numériques certifiées (ex : FranceConnect+). Concernant les guchets de mieux répartir la charge de traitement des procurations dans les commissariats et gendarmeries, éventuellement en permettant aux mairies d’en valider davantage. De mettre en place des audits aléatoires et des contrôles renforcés pour prévenir toute tentative de fraude.

Sur ce point les recommandations du rapport sont notamment les suivantes :

Recommandation n° 42 : Rétablir l’annexion des procurations au procès-verbal des bureaux de vote lors des élections.

Recommandation n° 43 : Permettre la centralisation en préfecture des registres des procurations pour faciliter leur vérification.

Recommandation n° 45 : Mettre en place un outil national de contrôle des procurations afin de faciliter l’identification de fraudes potentielles aux procurations dans les bureaux de vote.

La Sécurité des Opérations Électorales : Cybersécurité et Intégrité Physique ; La Lutte contre les Fausses Informations et l’Ingérence Étrangère

Le rapport pointe les nouvelles menaces numériques : la commission d’enqupete alerte sur la recrudescence des cyberattaques et des tentatives d’ingérence étrangère visant les processus électoraux, notamment la diffusion de fausses informations (« infox ») et les tentatives de piratage des systèmes informatiques liés aux élections, souvent orchestrées depuis l’étranger.

Les propositions Clés sont alors d’abord le renforcement de la Cybersécurité : Investir massivement dans la sécurisation des systèmes informatiques liés aux élections (REU, sites de résultats, plateformes de vote électronique). Mettre en place des exercices de simulation de crise. Renforcer la coordination entre les ministères de l’Intérieur, de la Justice et de la Défense (cyberdéfense) pour anticiper et contrer les menaces. Sensibilisation et Formation : Former les agents communaux et les assesseurs aux risques numériques et aux bonnes pratiques de sécurité.

Le rapport met l’accent en particulier sur les limites de la régulation actuelle. La législation existante peine à appréhender la rapidité et la viralité de la désinformation sur les plateformes numériques. Les propositions clés sont alors le renforcement de la Veille et de l’Analyse : Allouer des moyens accrus à l’État pour la détection et l’analyse des campagnes de désinformation ; la coopération avec les plateformes numériques, c’est à dire exiger d’elles une plus grande transparence sur les publicités politiques et les comptes suspects, et renforcer leur coopération avec les autorités judiciaires et les régulateurs. Le rapport propose une plus forte éducation aux médias et à l’Information, dès le plus jeune âge pour développer l’esprit critique des citoyens. Enfin le rapport propose de réfléchir à des sanctions plus dissuasives, à savoir d’etudier des mécanismes de sanctions plus rapides et dissuasives contre les acteurs de la désinformation électorale.

On citera ici parmi les recommandations du rapporteur :

Recommandation n° 70 : Engager une initiative française de renforcement ciblé du Digital Services Act (DSA), afin d’y intégrer un régime de vigilance renforcée applicable aux très grandes plateformes durant les campagnes électorales.

Recommandation n° 71 : Étendre les compétences de l’Arcom afin qu’elle puisse assurer, en tant que coordinateur des services numériques désigné au titre du DSA, une mission pérenne de supervision du respect des obligations relatives à la qualité et à la neutralité de l’information électorale par les plateformes.

Recommandation n° 72 : Mettre en place, avec l’appui de Viginum, un plan national de formation des journalistes aux risques et aux méthodes d’ingérences étrangères, en privilégiant la formation des personnels des médias audiovisuels d’information en continu ou généralistes.

Recommandation n° 73 : Renforcer les moyens humains, techniques et financiers alloués aux services institutionnels chargés de la lutte contre les ingérences étrangères, en particulier Viginum, afin de consolider durablement leurs capacités de détection, de riposte et de coordination.

Recommandation n° 76 : Consacrer juridiquement l’extension de la définition de l’ingérence numérique étrangère pour y inclure explicitement les tentatives de manipulation du débat électoral menées par des acteurs économiques étrangers recourant à des techniques inauthentiques, qu’il s’agisse d’organisations ou d’individus.

Le Financement des Campagnes Électorales : Transparence et Régulation

Le rapport fait le constat d’un cadre général important mais contesté du financement de la vie politique aujourd’hui. Le rapport salue le rôle essentiel de la CNCCFP dans le contrôle des comptes de campagne, garant de l’équité entre candidats et de la prévention des dérives.

Quelques points sont soulevés, des délais de remboursement parfois longs pour les partis et candidats, ce qui peut créer des difficultés de trésorerie ; le financement participatif qui soulève de nouvelles questions sur la traçabilité des dons et la prévention des fraudes. Il propose d’accélérer les procédures de remboursement et de renforcer les prérogatives de la CNCCFP sur le contrôle des micro-dons en ligne, notamment la vérification de l’identité des donateurs et le plafonnement des montants. Un point particulier est réalisé sur la transparence des dépenses numériques notamment pour intégrer les dépenses liées aux campagnes numériques (publicité sur les réseaux sociaux, influenceurs) dans le périmètre de contrôle et de plafonnement.

Mais surtout, ce sont les questions de problèmatiques de financement qui posent difficulté : par exemple, le financement par les personnes physiques, au coeur d’affaires récentes et dont on connaît aujourd’hui les dangers (absence de critère de résidence ou de nationalité pour les prêts : difficulté à sanctionner les prêteurs d’habitude malgré le cadre en vigueur ; contournement de la légilsation et risque d’enrichissement des prêteurs), ou le cas particulier des fondations politiques à la lisière du débat d’idées et de la propagande électorale. Ainsi, du projet Périclès : selon le rapport pour « Patriotes, Enracinés, Résistants, Identitaires, Chrétiens, Libéraux, Européens, Souverainistes », révélé par le journal L’Humanité dans un article de Thomas Lemahieu publié le 19 juillet 2024. Point de départ de toutes les enquêtes réalisées depuis sur le sujet, cet article révélait notamment que le projet Périclès, initié par le milliardaire Pierre-Édouard Stérin, François Durvye (Otium Capital, et aujourd’hui l’un des conseillers du Rassemblement national) et Alban du Rostu, visait un triple objectif de « victoire idéologique », de « victoire électorale » et de « victoire politique », tout en présentant une série de personnes classées à droite et à l’extrême droite, avec lesquelles était signalée l’ambition affichée de « construire une présence proche des dirigeants de demain » (…)  » Le projet s’articule autour de plusieurs axes stratégiques : – La mise en place d’une école destinée à former des candidats aux élections municipales de 2026, avec pour objectif de constituer une réserve de mille candidats et experts prêts à occuper des postes gouvernementaux en cas de victoire électorale ; – La collaboration avec des partis tels que le Rassemblement National (RN), en fournissant des conseils stratégiques et en participant à l’élaboration de programmes électoraux (1), ou encore l’UDR, en fournissant un vivier de candidats pour les élections législatives (2) ; – Le lancement ou l’acquisition de centres de réflexion pour influencer le débat public et promouvoir les idées défendues par le projet Périclès ; – Un engagement dans des campagnes juridiques sur des thématiques chères au fondateur, telles que l’immigration ou l’islam, afin de peser sur les décisions politiques et judiciaires (3) ; – Le financement de médias et de plateformes numériques pour diffuser les idées du projet et influencer l’opinion publique ». Or, à chaque fois, ces actions se trouvent à la lisière du droit électoral, et échappent donc grandement à son action, même si, au cas par cas, la CNCCFP pourrait agir pour réintégrer des dépenses en tant que recettes (qui seraient alors illégal, CQFD…)

Ici, c’est un sujet habituel et la CNCCFP elle-même est demandeuse, ce sont les pouvoirs de la CNCCFP que le rapport se propose d’augmenter de façon considérable afin de pouvoir face aux difficultés du moment, de nombreuses propositions faisant d’ailleurs écho aux préoccupations exprimées lors du colloque de janvier dernier au Conseil constitutionnel.

Les préconisations sont ainsi les suivantes, notamment :

Recommandation n° 25 : Étudier l’opportunité de faire évoluer l’obligation pour les « petits candidats » de devoir déposer un compte de campagne auprès de la CNCCFP lorsque leur campagne électorale n’a donné lieu à aucune dépense ni recette.

Recommandation n° 26 : Sanctionner les établissements de crédit qui ne respectent pas les obligations d’ouverture de compte bancaire prévues à l’article L. 52-6-1 du code électoral.

Recommandation n° 27 : Créer une banque de la démocratie afin de faciliter le financement des campagnes électorales et de prévenir les ingérences financières.

Recommandation n° 28 : Renforcer les effectifs de la CNCCFP pendant et après les campagnes afin d’améliorer l’accompagnement des candidats, de renforcer l’application des règles relatives au financement des campagnes électorales, et de diminuer le nombre de cas problématiques lors de l’étude des comptes.

Recommandation n° 29 : Étudier la possibilité de créer un mécanisme de saisine a priori de la CNCCFP donnant lieu à des « rescrits électoraux » afin de renforcer l’intelligibilité des règles applicables en matière de financement de la vie politique.

Recommandation n° 30 : Harmoniser les pratiques de contrôle des comptes de campagne des candidats pour renforcer la lisibilité des décisions de la CNCCFP.

Recommandation n° 31 : Renforcer le contrôle préalable des profils des rapporteurs travaillant pour la CNCCFP afin de prévenir tout conflit d’intérêts.

Recommandation n° 32 : Garantir une complète confidentialité de l’instruction des dossiers par la CNCCFP et sanctionner tout manquement à cette obligation légale.

Recommandation n° 68 : Confier explicitement à la CNCCFP la prérogative d’identifier des versements monétaires entre candidats et influenceurs, même en amont de l’interdiction d’effectuer de la publicité sur internet, si le soutien effectif aux candidats a été apporté durant cette période d’interdiction, et doter la CNCCFP des moyens afférents à l’exercice de cette nouvelle mission (pouvoirs de contrôle et moyens humains).

Recommandation n° 69 : Mettre en place un registre public des contrats d’influence politique afin d’y consigner les accords contractuels ou financiers entre des institutions publiques, des élus ou des candidats aux élections d’une part, et des influenceurs d’autre part. Devraient y figurer obligatoirement le montant financier de la transaction, les personnes ou institutions impliquées, et les termes de la prestation de service attendue. Ce registre ne ferait pas figurer les soutiens non rémunérés d’influenceurs à des institutions, élus ou candidats, puisqu’elles relèveraient de la liberté d’expression garantie par l’article 11 de la DDHC.

Recommandation n° 78 : Étendre les prérogatives de la CNCCFP, en lui reconnaissant un droit de communication direct auprès des prestataires ou partenaires des candidats, afin de garantir la vérifiabilité des flux financiers et l’identification des bénéficiaires réels.

Recommandation n° 79 : Renforcer les pouvoirs de vérification de la CNCCFP par l’instauration de contrôles sur pièces et sur place, portant non seulement sur les comptes des candidats, mais également sur ceux des partis et associations de soutien, afin de prévenir tout financement détourné.

Recommandation n° 80 : Créer un pouvoir de saisine de Tracfin par la CNCCFP pour vérifier la traçabilité d’opérations financières en lien avec le financement de la vie politique et des campagnes électorales.

Recommandation n° 81 : Mettre en place une commission d’enquête parlementaire consacrée au projet Périclès et, plus largement, aux tentatives d’ingérences financières dans les élections, en s’intéressant particulièrement aux effets de ces tentatives sur la qualité du débat démocratique, aux activités impliquées, aux modes de financements de ces activités et aux liens avec les formations politiques.

Recommandation n° 82 : Instaurer un plafond global de 50 000 euros pour les prêts consentis par une personne physique à un parti politique ou à un candidat, toutes campagnes confondues.

Recommandation n° 83 : Interdire les prêts consentis par une personne physique résidant à l’étranger à un parti politique ou à un candidat.

Médias et sondages : la critique du rapport de la commission d’enquête pour une politisation excessive

Le rapport rappelle le cadre légal strict encadrant la diffusion des sondages et la couverture médiatique des campagnes. Il note cependant que l’émergence des réseaux sociaux et des « nouveaux médias » brouille parfois les pistes entre information et promotion politique, posant de nouveaux défis de régulation.

Le rapport de commission suggère ainsi d’étudier l’extension des principes de pluralisme et d’équité du temps de parole aux acteurs majeurs des plateformes numériques, de doter l’ARCOM de moyens et de compétences accrus pour faire face aux défis de l’environnement numérique.

Concernant l’ARCOM, les propositions du rapporteur sont les suivantes, par exemple :

Recommandation n° 50 : Renforcer la visibilité des outremers dans les médias nationaux, en particulier sur les chaînes d’info en continu, en renforçant en lien avec l’Arcom les exigences conventionnelles opposables aux éditeurs présents sur la TNT.

Recommandation n° 64 : Augmenter les moyens humains et techniques affectés à l’Arcom afin de lui permettre de faire respecter un réel pluralisme des courants de pensées et d’opinions sur toutes les chaînes de télévision, suite à la décision du Conseil d’État du 13 février 2024.

Recommandation n° 65 : Encourager l’Arcom à appliquer pleinement ses pouvoirs de contrôle et de sanction pour les chaînes qui ne respectent pas leur obligation de représentation pluraliste des courants de pensées et d’opinions.

Recommandation n° 66 : Demander à l’Arcom de remettre au Parlement un rapport préfigurant une évolution du cadre juridique applicable aux chaînes d’information en continu en période électorale, en y intégrant une obligation de transparence sur la composition des plateaux, ainsi que des critères qualitatifs relatifs à la diversité des thématiques et des intervenant

Ce sont cependant les sondages qui font le plus les frais de ce rapport de la commission d’enquête, avec de très nombreuses recommandations sur la modification de la loi de 1977 et la régulation des sondages, sujet qui a dans le passé était très largement abordé dans le cadre du présent blog. En effet, le rapport détaille très longuement des biais qui auraient pour conséquence de sous-représenter le vote en faveur de Jean-Luc Mélenchon, tandis que celui pour Emmanuel Macron serait, lui, systématiquement surreprésenté. « Ces conclusions sont basées sur l’analyse de 14 000 documents que j’ai pu récupérer auprès de la commission nationale des sondages, défend Antoine Léaument. Les macronistes n’ont pas voulu cautionner le rapport parce que je critique la façon dont ils gèrent les choses et les problèmes posés par les sondages qui les avantagent. ». Le tiers du rapport et des préconisations réalisées par le rapporteur concernant donc les sondages.

Recommandation n° 84 : Interdire la publication de sondages du second tour avant que les résultats du premier tour et les candidats effectivement présents au second tour ne soient connus.

Recommandation n° 85 : Rendre obligatoire, pour les enquêtes électorales, la publication par les sondeurs des résultats obtenus sans le filtre des « certains d’aller voter » aux côtés des résultats des « certains d’aller voter ».

Recommandation n° 86 : Renforcer les moyens de la Commission des sondages afin de lui permettre d’effectuer un contrôle efficace de la qualité des sondages effectués.

Recommandation n° 87 : Modifier la composition de la Commission des sondages au profit de profils plus spécialisés afin de renforcer l’efficacité de son action de contrôle.

Recommandation n° 88 : Renouveler le collège de la Commission des sondages par moitié pour assurer un meilleur suivi de l’activité de la Commission dans le temps.

Recommandation n° 89 : Étendre aux prestataires de la Commission des sondages le régime d’incompatibilité prévu à l’article 6 de la loi du 19 juillet 1977.

Recommandation n° 90 : Conditionner la nomination des membres de la commission des sondages à un contrôle préalable de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

Recommandation n° 91 : Étudier l’opportunité d’étendre à une durée de cinq ans au lieu de trois ans le régime d’incompatibilité prévu à l’article 6 de la loi du 19 juillet 1977.

Recommandation n° 92 : Renforcer l’indépendance de la Commission des sondages en la dotant de locaux propres, hors du Conseil d’État.

Recommandation n° 93 : Publier systématiquement une mise au point préalable lorsqu’un sondage contrôlé par la commission des sondages présente des difficultés méthodologiques.

Recommandation n° 94 : Faire évoluer la doctrine de la Commission des sondages en faveur d’un recours plus systématique à ses outils de sanction lorsqu’elle constate des manquements.

Recommandation n° 95 : Imposer aux partenaires d’access panels et aux instituts de sondage la transmission à la Commission des sondages des critères de recrutement des panélistes et les données détaillées concernant la constitution des échantillons, pour permettre une évaluation rigoureuse de la représentativité de ces échantillons.

Recommandation n° 96 : Interdire toute forme de gratification dans le cadre des sondages politiques et d’opinion sur des sujets d’actualité réalisés par les instituts de sondage.

Recommandation n° 97 : Intégrer l’ensemble des sondages en lien direct ou indirect avec le débat politique et médiatique au sein du champ de compétence de la commission des sondages.

Recommandation n° 98 : Réfléchir à un principe d’interdiction de publication pour l’ensemble des sondages en lien avec le débat politique lorsqu’ils n’ont pas été contrôlés de façon préalable par la commission des sondages.

Recommandation n° 99 : Interdire les sondages d’intentions de vote avant que la liste définitive des candidats ou des listes en lice à une élection ne soit connue, afin de préserver l’intégrité des résultats des scrutins électoraux.

Recommandation n° 100 : Interdire la publication de sondages « jour du scrutin » à 20 heures le soir des élections et se baser sur les résultats réels de l’élection pour le traitement médiatique de ces évènements politiques.

Recommandation n° 101 : Renforcer la transparence des sondages en complétant la liste des mentions obligatoires lors de leur publication ou diffusion afin de renforcer l’information des citoyens.

Recommandation n° 102 : Présenter les résultats des sondages sous la forme d’intervalles ou de plages de résultats afin de matérialiser les marges d’erreur.

Recommandation n° 103 : Indiquer de manière visible les effectifs réels répondant à chaque question à l’intérieur d’un sondage.

Recommandation n° 104 : Insérer lors de chaque publication ou diffusion d’un sondage politique une mention explicite des limites techniques et informatives applicables audit sondage.

Recommandation n° 105 : Exiger des instituts de sondage la transmission à la Commission des sondages des données brutes anonymisées, non agrégées et non redressées sous forme de tableur, ainsi que les formules de redressement appliquées pour chaque sondage.

Recommandation n° 106 : Normer les notices expertes des instituts de sondage afin de définir clairement les données qui doivent y figurer et de permettre leur comparaison entre instituts.

Recommandation n° 107 : Publier, pour chaque sondage contrôlé par la Commission des sondages, la notice experte adressée par l’institut concerné, afin de renforcer l’auditabilité des méthodes employées.

Recommandation n° 108 : Publier, pour chaque sondage contrôlé par la Commission des sondages, les données brutes anonymisées, non agrégées et non redressées sous forme de tableur, ainsi que les formules de redressement appliquées pour chaque sondage.

Recommandation n° 109 : Définir un cadre renforcé de prévention des conflits d’intérêts entre les médias et les instituts de sondage afin d’éviter la constitution d’un dispositif de « guerre des idées » de nature à manipuler l’information pour influencer les élections.

Recommandation n° 110 : Renforcer la lutte contre les concentrations dans le domaine des sondages et des médias en interdisant à un particulier de détenir directement ou indirectement à la fois un média et un institut de sondage.

Recommandation n° 111 : Étudier les voies et moyens de lutter efficacement contre la diffusion de fausses informations électorales pendant la période de réserve, en particulier depuis l’étranger, et, en règle générale, lors des campagnes électorales.

Recommandation n° 112 : Mieux encadrer le recours par les pouvoirs publics aux sondages afin de garantir que leur utilisation s’inscrive pleinement dans une logique d’intérêt général.

Recommandation n° 113 : Prévoir la remise chaque année au Parlement dans le cadre du projet de loi de finances annuel de la liste des sondages commandés par le Gouvernement et mettre à disposition du public les résultats de ces sondages.

Les contributions des groupes politiques : le comportement critiqué du rapporteur

Au moment de leur contribution, différents groupes politiques ont pu se satisfaire de la qualité des travaux mais déplorer qu’ils finissent par être excessivement politisés.

Ainsi, le Rassemblement national indique « Les députés du Rassemblement National tiennent à remercier les services pour l’organisation des travaux. Les auditions, riches et nombreuses, ont permis de soulever certaines problématiques essentielles. Nous déplorons l’attitude délétère du Rapporteur qui a éclipsé la bonne tenue des débats, sous le regard bien silencieux du Président macroniste. Alors que les auditions apportaient des éléments concrets et utiles pour l’organisation des élections et la résolution de ces problèmes, le Rapporteur a transformé la suite des travaux en un vaste procès politique, nourri d’invectives et de suspicions paranoïaques. Victime d’un complot du système, les sondeurs sous-estimeraient la puissance du vote mélenchoniste. Malgré les innombrables explications des instituts de sondage, le Rapporteur persiste avec cette théorie infondée. Naturellement, sous couvert de transparence (ex : la publication des formules de redressement), les recommandations formulées pourraient conduire à l’interdiction des sondages. Le Président lui-même, lors de la réunion de l’examen de ce rapport l’atteste en déclarant que « rien dans les auditions ne vient à l’appui des constatations erronées, déformées, inventées ». Bien qu’un rapport de commission d’enquête soit le fruit de l’écriture unique du Rapporteur, nous déplorons que le bloc central ne s’y soit pas opposé. De tels mensonges et torsions de la réalité des auditions sont une injure pour le travail parlementaire et la représentation nationale. Cette paranoïa loufoque s’illustre également à travers les radiations des listes électorales, qui toucheraient presque exclusivement leur mouvement. Nous sommes frappés par la schizophrénie de ce tract politique, notamment au regard des recommandations portant sur le nouveau régime que son auteur souhaite instaurer : renverser la Ve République pour créer une VIe République, avec notamment une Assemblée constituante, le droit de vote pour tous, y compris les étrangers, et la révocation des élus – y compris du Président de la République – à tout moment. Cette nouvelle architecture institutionnelle conduirait inexorablement la France vers les abysses du déclassement, accompagnée d’une instabilité chronique »

Quant aux autres groupes, ils font le tri des recommandations proposées dans le rapporteur pour préconiser l’adoption de celles qui leur semble pertinentes. Ainsi par exemple du groupe écologiste et social :

« Nous les partageons en partie, mais souhaitons dans cette contribution mettre en avant les mesures que nous jugeons prioritaires.
Pour mobiliser les électeurs (I.), nous estimons ainsi qu’il est primordial :
– de mettre en place en urgence un moratoire des radiations pour perte d’attache communale pour éviter de priver du droit de vote nos compatriotes qui sont touchés par ces radiations (recommandation n° 1) et, à terme, d’interdire définitivement les radiations pour perte d’attache communale via la mise en place d’un système d’inscription automatique sur les listes électorales permettant d’éviter les radiations abusives (recommandation n° 2).
– d’expérimenter l’utilisation du dispositif FR-Alert pour rappeler aux citoyens les échéances électorales importantes, telles que les dates limites d’inscription sur les listes électorales ou les jours de scrutin (recommandation n° 8).
– d’accorder le droit de vote et d’éligibilité aux élections municipales aux étrangers non ressortissants de l’Union européenne résidant en France (recommandation n° 6).
Pour organiser les élections (II.), nous estimons ainsi qu’il est prioritaire :
– de créer une banque de la démocratie afin de faciliter le financement des campagnes électorales et de prévenir les ingérences financières (recommandation n° 27).
– d’harmoniser l’application par les commissions de propagande de la réglementation en vigueur en dotant ces dernières d’outils supplémentaires d’aide à la décision (recommandation n° 23).
– de renforcer la visibilité des outremers dans les médias nationaux, en particulier sur les chaînes d’info en continu, en renforçant en lien avec l’Arcom les exigences conventionnelles opposables aux éditeurs présents sur la TNT (recommandation n° 50).
– de développer rapidement une solution souveraine et internalisée dans les administrations de l’État pour les opérations de vote en ligne des Français de l’étranger afin de ne pas dépendre de prestataires externes sur un sujet aussi crucial que celui de l’exercice de la souveraineté du peuple (recommandation n° 59).
Pour protéger l’information (III.), nous estimons ainsi qu’il est essentiel :
– d’augmenter les moyens humains et techniques affectés à l’Arcom afin de lui permettre de faire respecter un réel pluralisme des courants de pensées et d’opinions sur toutes les chaînes de télévision, suite à la décision du Conseil d’État du 13 février 2024 (recommandation n° 64) et d’encourager l’Arcom à appliquer pleinement ses pouvoirs de contrôle et de sanction pour les chaînes qui ne respectent pas leur obligation de représentation pluraliste des courants de pensées et d’opinions (recommandation n° 65).
– d’étendre les compétences de l’Arcom afin qu’elle puisse assurer, en tant que coordinateur des services numériques désigné au titre du DSA, une mission pérenne de supervision du respect des obligations relatives à la qualité et à la neutralité de l’information électorale par les plateformes (recommandation n° 71).
– de consacrer juridiquement l’extension de la définition de l’ingérence numérique étrangère pour y inclure explicitement les tentatives de manipulation du débat électoral menées par des acteurs économiques étrangers recourant à des techniques inauthentiques, qu’il s’agisse d’organisations ou d’individus (recommandation n° 76).
– d’instaurer un plafond global de 50 000 euros pour les prêts consentis par une personne physique à un parti politique ou à un candidat, toutes campagnes confondues (recommandation n° 82).
Enfin, pour réguler les sondages (IV.), nous estimons ainsi qu’il serait utile :
– d’indiquer de manière visible les effectifs réels répondant à chaque question à l’intérieur d’un sondage (recommandation n° 103).
– d’insérer lors de chaque publication ou diffusion d’un sondage politique une mention explicite des limites techniques et informatives applicables audit sondage (recommandation n° 104).
– de mieux encadrer le recours par les pouvoirs publics aux sondages afin de garantir que leur utilisation s’inscrive pleinement dans une logique d’intérêt général (recommandation n° 112)
« 

Conclusion : un texte qui reste utile comme point d’étape du droit électoral

Même si la presse s’en fait largement fait l’écho, la politisation finale de ce rapport de commission d’enquête ne doit pas conduire à néliger l’intérêt de ces travaux. Ils permettent un tour d’horizon global et, en attendant le grand soir, permet de replacer les problématiques contemporaines et un certain nombde de propositions sur les grand sujets du moment. Il doit donc être analysée avec le sérieux qu’il mérite et permettra, pour chaque point, d’y revenir pour faire avancer un certain nombre de sujets dont la plupart n’ont pas attendu ce rappport de commission d’enquête pour être connus… et s’en inquiéter…

Romain Rambaud