Elections législatives de 2024 : le Conseil constitutionnel clot le contentieux en annulant l’élection dans la cinquième circonscription de Saône-et-Loire [R. Rambaud]

Ce vendredi 7 mars 2025, prestations de serment des nouveaux membres et du nouveau Président du Conseil constitutionnel à 12h en entrée en fonction demain à 0h obligent, le Conseil constitutionnel vient de terminer à l’instant de traiter le contentieux des élections législatives ayant fait suite à la dissolution du 9 juin 2024.

13 décisions ont été ainsi été rendues, concernant les circonscriptions suivantes : Saône-et-Loire (3e circ.), ASaône-et-Loire (5e circ.), Côte-d’Or (2e circ.), Côte-d’Or (5e circ.), Français établis hors de France dans deux décisions (8e circ.), Pyrénées-Atlantiques (3e circ.), Loiret (3e circ.), Yvelines (11e circ.), Charente-Maritime (3e circ.), Dordogne (1re circ.), A.N., Nouvelle-Calédonie (2e circ.), Bouches-du-Rhône (11e circ.).

Comme l’indique le communiqué de presse du Conseil constitutionnel, par la décision n° 2024-6367 AN, il a annulé l’élection qui s’est déroulée dans la cinquième circonscription de Saône-et-Loire, dans une configuration intéressante de triangulaire (et de quandrugulaire potentielle). En effet, à l’issue du premier tour du scrutin dans cette cinquième circonscription, M. Arnaud SANVERT (RN élu député), Mme Fatima KOURICHE, M. Louis MARGUERITTE et M. Gilles PLATRET s’étaient qualifiés pour le second tour, le nombre de suffrages obtenus par M. PLATRET excédant de quatre voix seulement le seuil de 12,5 % du nombre des électeurs inscrits. M. MARGUERITTE, arrivé 3ème, s’était désisté pour le second tour (en vain)… mais pas M. PLATRET. M. MARGUERITTE a saisi le Conseil constitutionnel.

Ce dernier invoquait des discordances entre les mentions portées sur les procès-verbaux de recensement des votes de certains bureaux. Le Conseil constitutionnel a constaté en effet qu’il résultait de l’examen du procès-verbal du bureau de vote n° 4 de la commune de Chalon-sur-Saône que l’addition des voix obtenues par l’ensemble des candidats excède de deux voix la différence entre le nombre de votants et le nombre de bulletins blancs ou nuls recensés, alors qu’il est fait état d’erreurs commises par une table de dépouillement ayant conduit à recenser 102 suffrages exprimés pour un paquet de cent enveloppes. Il résultait, par ailleurs, de l’examen du procès-verbal du bureau de vote n° 1 de la commune de Torcy que l’addition des voix obtenues par l’ensemble des candidats excède de deux voix la différence entre le nombre de votants et le nombre de bulletins blancs ou nuls recensés, alors qu’il est fait état de 102 bulletins trouvés par une table de dépouillement pour 100 enveloppes. Enfin, le nombre de votants et d’émargements recensés au procès-verbal du bureau de vote n° 9 de Chalon-sur-Saône s’établit, selon les pages de ce document, soit à 458 soit à 459, alors que, pour une table de dépouillement, il est fait état de 101 bulletins trouvés pour cent enveloppes. Le Conseil constitutionnel estime donc qu’il existe des doutes concernant cing suffrages et qu’y a lieu, par suite, de réduire de cinq voix le nombre de suffrages obtenus par chaque candidat présent au premier tour et le nombre total de suffrages exprimés. La prise en compte des déductions opérées en conséquence des irrégularités constatées conduit à modifier l’identité des candidats qualifiés pour le second tour de scrutin, M. PLATRET ne remplissant pas la condition tenant à l’obtention d’un nombre de suffrages au moins égal à 12,5 % du nombre des électeurs inscrits pour s’y présenter. Le Conseil constitutionnel en déduit que, dans ces conditions, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs soulevés par la requête, les résultats du premier tour de scrutin ayant eu des conséquences déterminantes sur le second tour, il y a lieu d’annuler les opérations électorales contestées.

Avec cette décision, le Conseil constitutionnel a donc terminé l’examen du contentieux des élections législatives 2024 et il a donc prononcé deux annulations seulement, la première ayant concerné la deuxième circonscription du Jura, à la suite de la décision n° 2024-6341 AN du 13 février 2025, liée à l’inéligibilité d’un candidat (v. analyse sur le présent blog). C’est un nombre d’annulation faible, mais à mettre en perspective avec le nombre faible de saisines, 85 recours seulement. Guy Prunier avait expliqué, sur ce blog, que cela était lié largement aux très grands nombres de désistements ayant conduit les écarts de voix à être finalement plus importants qu’à l’accoutumée.

Ce contentieux étant bouclée, la « nouvelle autorité », c’est à dire le Conseil constitutionnel composé de trois nouveaux membres et avec un nouveau Président, pourra commencer une nouvelle phase de travail, avec des questions électorales importantes à venir, notamment l’affaire 2025-1129 QPC portant sur le 1° de l’article L. 230 et l’article L. 236, dont on dit, à tort ou à raison on y reviendra, qu’elle pourrait avoir un impact sur la situation de Marine Le Pen en vue de l’élection présidentielle en 2027 en rapport avec sa situation juridiciaire…

A suivre !

Romain Rambaud