Par une décision n° 2023-199 PDR du 23 février 2023, Mme Marine LE PEN, le Conseil constitutionnel a donné acte du désistement pur et simple de Mme LE PEN de son recours contre la décision de la CNCCFP concernant son compte de campagne.
Celle-ci avait en effet saisi le Conseil constitutionnel le 18 janvier 2023. Elle demandait l’annulation de la décision du 14 décembre 2022 par laquelle la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a approuvé après réformation son compte de campagne et a arrêté le montant du remboursement dû par l’État à 10 220 842 euros. Elle demandait également au Conseil constitutionnel d’arrêter à 10 552 508 euros le montant de ce remboursement.
D’après la presse, le compte de campagne a bien été validé et il s’agissait de contester surtout le refus de la CNCCFP de rembourser les dépenses relatives au flocage de ses bus de campagne. En effet, ces flocages sont considérés comme contraires à l’article L. 51 du code électoral qui interdit l’affichage sauf exceptions très strictes dans les six mois qui précèdent le mois de l’élection : « Pendant les six mois précédant le premier jour du mois d’une élection et jusqu’à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, tout affichage relatif à l’élection, même par affiches timbrées, est interdit en dehors de cet emplacement ou sur l’emplacement réservé aux autres candidats, ainsi qu’en dehors des panneaux d’affichage d’expression libre lorsqu’il en existe ». Ce principe d’interdiction a d’abord été clairement indiqué par le Gouvernement lors d’une réponse écrite à un sénateur qui s’inquiétait de la condamnation pénale d’un maire ayant utilisé le flocage d’un véhicule à 3000 euros d’amende (2 000 avec sursis), sur le fondement de l’article L. 90 du code électoral (Sénat, QE n° 23741 de M. Michel Canévet, publiée dans le JO Sénat du 15/07/2021, p. 4355). Cette interdiction a ensuite été confirmée par la jurisprudence du Conseil d’Etat (CE, El. Mun. de Colombes, 30 dec. 2021, n°45081) avant d’être reprise par le Conseil constitutionnel. Ce dernier considère en effet, dans les décisions rendues relatives aux élections législatives de 2022 (v. sur ce point les précédents articles du blog du droit électoral), et même si cela ne conduit pas à des annulations contentieuses en application de la jurisprudence classique relative à l’affichage (caractère massif, prolongé et répété, analyse en termes d’écart de voix), que « l’utilisation (…) d’un véhicule comportant un affichage électoral (…) est constitutive d’une irrégularité », au regard de l’article L. 51 du code électoral (n°2022-5758 AN, 2 dec. 2022 ; n°2022-5790 AN, 27 janv. 2023 ; n° 2022-5775 AN, 27 janv. 2023). Cette question a enfin fait l’objet de la même solution pour l’élection présidentielle à l’occasion de l’examen de comptes de campagne de certains candidats qui avaient utilisé ce procédé. La CNCCFP a ainsi considéré, concernant les comptes de campagne de Jean Lassale et de Fabien Roussel, qu’en « application des dispositions de l’article L. 51 du code électoral », concernant « des frais de flocage d’un véhicule à caractère d’affichage électoral en méconnaissance des dispositions précitées », et le « recours à ce type de procédé constituant une dépense irrégulière », il y a lieu de retrancher ces dépenses du compte de campagne, puisque le « caractère irrégulier d’une telle dépense fait obstacle à ce qu’elle puisse faire l’objet d’un remboursement de la part de l’Etat » (JORF n° 0023 du 27 janvier 2023). La solution était donc exactement la même pour Mme Le Pen, dont le recours était , au regard de toutes les jurisprudences précitées, voué à l’échec sur ce point.
Ce recours avait cependant par ailleurs eu pour effet de suspendre la publication de la décision de la CNCCFP relative au compte de campagne de Mme Le Pen, qui n’a donc pas été publiée en même temps que les autres au Journal officiel du 27 janvier 2023 (v. sur ce sujet l’article du blog du droit électoral). Ce désistement va donc débloquer la situation et permettre l’examen de la décision de la CNCCFP sur le compte de campagne de Marine Le Pen.
Romain Rambaud