Alors qu’il devait être à l’origine publié le 23 février, c’est finalement (en raison du déplacement du premier ministre en Chine, le Conseil des ministres se tient ce vendredi) aujourd’hui 24 février qu’est publié le décret convoquant les électeurs pour l’élection du Président de la République (décret n° 2017-223 du 24 février 2017). On peut considérer (même si en réalité il en existe de nombreux selon le dispositif considéré, contrôle financier, interdictions de propagande…), que la publication de ce décret de convocation marque le point de départ juridique de l’élection présidentielle. Politiquement, ce n’est qu’une étape, qui reste toutefois fondamentale.
La publication de ce décret entraîne au moins deux conséquences fondamentales : il marque le point de départ de la récolte des présentations et il va être suivi de l’installation de la Commission nationale de contrôle de la campagne en vue de l’élection présidentielle.
Le recueil des présentations
Nous l’avons dit ici à de nombreuses reprises, la récole des présentations aura cette année une saveur particulière en raison des modifications apportées à la loi organique de 1962 par la loi organique du 25 avril 2016, aujourd’hui mise en oeuvre par le décret n° 2016-1819 du 22 décembre 2016 relatif à l’élection du Président de la République qui a modifié le décret du 8 mars 2001 de mise en œuvre de la loi organique relative à la présidentielle.
La loi organique de 2016 a rendu plus difficile le recueil des parrainages dans la mesure où il n’est plus possible pour une équipe de campagne de récolter les présentations auprès des élus puis de les amener au Conseil constitutionnel. Désormais, chaque élu doit le faire lui-même, c’est à dire envoyer lui-même la présentation au Conseil constitutionnel. La loi organique précise désormais explicitement que « les présentations des candidats sont rédigées sur des formulaires, revêtues de la signature de leur auteur et adressées au Conseil constitutionnel par leur auteur par voie postale, dans une enveloppe prévue à cet effet, ou par voie électronique. Les formulaires et les enveloppes sont imprimés par les soins de l’administration conformément aux modèles arrêtés par le Conseil constitutionnel. Les modalités de transmission par voie électronique sont fixées par décret en Conseil d’Etat ». La voie électronique n’étant pas applicable pour cette élection, seule la voie postale est autorisée.
Or cet envoi ne commence qu’à compter de la publication du décret de convocation des électeurs : l’article 2 du décret de 2001 prévoit désormais que « les présentations des candidats à l’élection du Président de la République sont rédigées sur des formulaires imprimés par les soins de l’administration et adressées dans des enveloppes postales, conformément aux modèles arrêtés par le Conseil constitutionnel. Lorsque l’élection a lieu dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article 7 de la Constitution, les formulaires et les enveloppes postales servant à leur acheminement sont adressés par l’autorité administrative aux citoyens habilités par la loi à présenter un candidat à compter de la publication du décret convoquant les électeurs ». La date limite de réception par le Conseil constitutionnel a été fixée au 17 mars 2017.
La circulaire INTA1701970C du 31 janvier 2017 destinée aux préfectures précise que les administrations vont donc envoyer les formulaires et les enveloppes officielles dès la publication du décret de convocation afin que les élus disposent d’un temps maximal. Elle précise que les documents seront « de préférence » remis en mains propres contre récépissé, que le courrier d’accompagnement devra préciser l’obligation d’envoyer directement une seule présentation au moyen de l’enveloppe prévue à cet effet. De ce point de vue, le report de la publication du décret de convocation des électeurs, ayant lieu en fin de semaine, pourrait avoir un effet en diminuant le temps dont les élus disposent pour se présenter de trois semaines à deux et demi : il semble que le NPA éprouve aujourd’hui des difficultés pour trouver les parrainages. Et c’est cela sans compter la publication sur son site internet par le Conseil constitutionnel, deux fois par semaine, des présentations.
Le Conseil constitutionnel vient d’ailleurs de publier une décision n° 2017-137 ORGA du 23 février 2017 pour reporter la première publication des parrainages. Selon cette décison, « Compte tenu du report de la publication du décret de convocation des électeurs pour l’élection présidentielle, qui a pour effet de différer le début de la période de recueil des « parrainages », le Conseil constitutionnel a décidé que la première publication de la liste des « parrainages » valablement présentés interviendra le mercredi 1er mars 2017. ». Cette publication, qui aura lieu sur le site internet « Présidentielle 2017 » du Conseil constitutionnel fera l’objet d’un point de presse du Président Laurent Fabius mercredi 1er mars 2017 à 17 heures.
L’installation de la Commission nationale de contrôle de la campagne en vue de l’élection présidentielle (CNCCEP)
Si cela est moins médiatique, cela n’en reste pas moins important. L’article 13 du décret de 2001 prévoit en effet qu’une Commission nationale de contrôle de la campagne électorale (CNCCEP) veille au respect des dispositions relatives à la campagne électorale présidentielle. Elle est installée le « lendemain du jour de la publication du décret portant convocation des électeurs ».
Elle intervient, le cas échéant, auprès des autorités compétentes pour que soient prises toutes mesures susceptibles d’assurer l’égalité entre les candidats. Elle transmet d’office à la CNCCFP les irrégularités portées à sa connaissance susceptibles d’affecter les comptes de campagne des candidats. Elle contrôle les instruments de propagande officielle des candidats et les commissions locales en charge de l’envoi de la propagande officielle. A compter du 10 avril 2017, figureront sur son site internet les déclarations des candidats, en version papier et sous forme d’enregistrement sonore. Elle publie à l’issue de l’élection un rapport précieux pour l’analyse et le suivi de l’élection présidentielle.
La composition de cette commission est particulièrement prestigieuse (décret n° 2017-221 du 24 février 2017 relatif à la composition et au siège de la Commission nationale de contrôle instituée par le décret n° 2001-213 du 8 mars 2001). Elle comprend cinq membres : le vice-président du Conseil d’Etat, président ; le premier président de la Cour de cassation ; le premier président de la Cour des comptes et deux membres en activité ou honoraires du Conseil d’Etat, de la Cour de cassation ou de la Cour des comptes, désignés par les trois membres de droit. Elle est assistée de rapporteurs et de fonctionnaires.
Son site internet, aujourd’hui encore fermé, devrait donc rouvrir rapidement. De quoi alimenter, encore, les réflexions du blog du droit électoral.
Romain Rambaud