12/11/2014 : [PUB] Parution de l’article « La loi du 10 janvier 1936 à la croisée des chemins » dans l’AJDA n° 38 du 10/11/2014 + ACTUS (déjà!)

Une mauvaise habitude est  en train de devenir une coutume, puisque j’ai le plaisir de vous annoncer par le présent article la parution de mon étude « La loi du 10 janvier 1936 à la croisée des chemins » sur l’arrêt Envie de Rêver du Conseil d’Etat du 30 juillet 2014, n°370306-372180, dans l’AJDA n° 38 du 10/11/2014 (cette semaine).

Cette décision concerne l’examen au fond de la dissolution en juillet 2013 des groupes d’extrême-droite de Serge Ayoub Troisième Voie et Jeunesses nationalistes révolutionnaires, ainsi que de l’association gérant le bar associatif dans le 15 ème arrondissement, le Local. Il s’agit toutefois d’une décision de principe qui permet de revenir sur l’ensemble du dispositif et justifie une étude complète.

Je décris, dans cet article, de quelle manière le Conseil d’Etat a justifié constitutionnellement ce dispositif (car issu d’une ordonnance non ratifiée à la date de l’arrêt), au nom de l’ordre public, et de quelle manière il semble opérer un contrôle plus approfondi.

Cependant, je démontre également les failles de son raisonnement lorsqu’il accepte la dissolution des groupes  Troisième Voie et Jeunesses nationalistes révolutionnaires car ils constituent des milices, mais rejette la caractérisation de l’incitation à la haine raciale, ou lorsqu’il annule la dissolution de l’association Envie de rêver, qui constitue pourtant pour ces organisations le « nerf de la guerre », puisque c’est elle permet à ces associations de disposer potentiellement de biens et de financement (sans compter leur audience). En annulant cette dissolution au motif que l’objet exclusif de cette association n’est pas le soutien à ces groupes sous prétexte qu’elle organise des conférences dont l’objet n’est d’ailleurs pas douteux, c’est une faille dans l’effectivité de la loi qui est ainsi créée.

Plus largement, j’y critique cette procédure trop souvent instrumentalisée par le pouvoir politique. Je démontre notamment, car cet aspect est très méconnu, que cette procédure sert davantage à sauvegarder les intérêts de l’Etat, variable dans le temps, qu’à sauver la République: qui parle de l’utilisation de cette procédure tout au long du processus de décolonisation, dès 1937 pour dissoudre l’Etoile Nord Africaine, et non pas de la procédure de la loi de 1901, comme on le lit parfois par erreur ? Qui parle du contrôle de fait asymétrique de cette procédure s’agissant du Vietnam, où le Conseil d’Etat a autorisé la dissolution de l’association indépendantiste mais annule celle de l’association pro-Vietnam français ?.

J’y critique par ailleurs le contrôle effectué par le Conseil d’Etat qui s’avère selon moi très faible, notamment en ce que le Conseil d’Etat n’exerce pas de véritable contrôle de proportionnalité et, dans cette décision, s’avère peu précis sur les critères qu’il utilise, notamment pour caractériser l’incitation à la haine raciale susceptible de justifier une dissolution, alors que l’affaire Dieudonné a placé la police administrative dans un contexte particulier de ce point de vue.

Dans tous les cas, cet article et cette analyse sont plus que jamais d’actualité et méritent déjà de faire l’objet de deux mises à jour :

 En premier lieu, la ratification de l’ordonnance de mars 2012 (et donc de l’article L. 212-1 CSI) devrait intervenir par surprise lors de l’adoption de la loi sur le terrorisme. En effet, alors que le projet de loi renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme, n° 2110, déposé le 9 juillet 2014, ne le prévoyait pas, la ratification de l’ordonnance a été inséré dans le projet de loi par le Sénat le 16 octobre dernier dans un article 15 quinquies (nouveau) qui prévoit que « les ordonnances n° 2012-351 du 12 mars 2012 relative à la partie législative du code de la sécurité intérieure, n° 2013-518 du 20 juin 2013 modifiant certaines dispositions du code de la sécurité intérieure et du code de la défense (parties législatives) relatives aux armes et munitions et n° 2013-519 du 20 juin 2013 modifiant certaines dispositions du code de la sécurité intérieure (partie législative) relatives à l’outre-mer sont ratifiées ». Cet article est devenu l’article 24 du projet de loi adopté en CMP.  La ratification du texte va donc finalement intervenir. Tout va trop vite, mais en tout état de cause, cette ratification nous donne raison : il n’y aura pas de réflexion d’ensemble sur ce dispositif.

– En deuxième lieu, comme nous l’avions analysé dans un précédent article, Dieudonné et Soral ont créé leur parti politique, Réconciliation Nationale, annoncée sur YouTube.  En raison du caractère antisémite (ou potentiellement qualifiable comme tel), de cette organisation, ils s’exposent à une procédure de dissolution administrative. Dans la mesure où nous avions écrit un long article sur le sujet, on se contentera ici d’y renvoyer.

Qu’il est plaisant, tout cas, de faire de la recherche vivante !

A suivre !

Romain Rambaud