20/01/2013 : Elections municipales de 2014 : la valse des sondages commence

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Le Journal du dimanche s’est fait une spécialité de la publication de sondages. Ce journal populaire aime à rendre compte de manière privilégiée de l’état de l’opinion publique ; d’une certaine manière, il s’agit même d’une politique éditoriale. Et ce jour n’a pas fait exception à la règle.

Le JDD tire ainsi le premier en publiant un sondage relatif aux municipales de Paris ; mais cette publication n’est que la partie émergée de l’iceberg, la réalisation de sondages souterrains, qui ressortent parfois dans la presse, ne cessant d’augmenter. L’activité de la Commission des sondages devrait donc se renforcer dans les semaines à venir.

 

Le sondage du 20 janvier 2013 relatif aux élections municipales à Paris

Le JDD a récidivé. C’est en effet, après un sondage paru en septembre dont on avait rendu compte ici, la deuxième fois que le JDD publie un sondage relatif aux municipales à Paris.  La notice du sondage est consultable sur le site du journal.

Ce sondage, réalisé par l’Ifop/Fiducial, révèle qu’Anne Hidalgo, première adjointe du maire de Paris, candidate déclarée, gagnerait dans tous les cas de figure face au candidat UMP. Elle sortirait largement première au soir du premier tour (avec 38 à 39% des suffrages) quel que soit son adversaire à droite, alors que les autres candidats potentiels des partis de gauche ne passent pas la barre des 10%. Quand au second tour, elle le gagnerait largement avec 56% des voix.

Quant à la droite, le sondage Ifop/Fiducial a testé trois hypothèses : NKM, François Fillon et Rachida Dati.

Il ressort de ce sondage que François Fillon récolterait 28% des voix, ce qui constitue une chute par rapport au premier sondage, publié il y a quelque mois : sans doute le signe de la contre-performance des primaires. De quoi conforter le principe de prudence qui à l’époque avait été un peu malmené par le JDD. A deux ans des élections, un sondage portant sur les municipales a peu de valeur ; mais certes il en gagne toujours davantage à mesure que les échéances approchent.

NKM réalise un très bon score puisqu’elle est mesurée à 28%, c’est à dire qu’elle fait jeu égal avec l’ancien premier ministre ; une performance pour une personne qui est testée pour la première fois dans un sondage. Et il était bon de la tester, au regard de la percée médiatique et politique qu’elle a réussi à réaliser depuis quelques mois.

Les deux candidats sont toutefois donnés perdants au second tour, avec 44% des voix.

Quant à Rachida Dati, enfin, également testée car il s’agit à ce stade d’une candidature fort probable, elle fait moins bien puisqu’elle recueillerait 21% des voix.

Il est par ailleurs précisé dans le commentaire du sondage qu’en cas de « primaire » au sein de l’UMP, elle ne réaliserait que 8 % des voix, contre 21% pour NKM et 64% pour Fillon. Sur ce point, le journal a raison – et en cela il se conforme à la jurisprudence de la Commission des sondages – de souligner que ce résultat est réalisé sur le seul sous-échantillon des sympathisants UMP, de taille réduite et par conséquent à la représentativité limitée : ce sont des statistiques fondées sur 40 personnes seulement ! En revanche, il faut préciser que la question posée ne portait pas vraiment sur une primaire, mais sur l’idée que les sympathisants de droite se font de celui qui serait le plus capable de battre la gauche… ce qui n’est pas exactement la même chose.

Ce sont donc des éléments intéressants qui sont publiés aujourd’hui et qui ne manqueront pas d’enrichir le débat politique à venir, d’autant que du point de vue juridique la notice du sondage ne semble pas présenter d’anomalies au regard de la jurisprudence actuelle de la Commission des sondages.

La publication de ce sondage démontre donc que le droit des sondages n’a pas grand chose de cyclique… puisqu’il redémarre déjà. Et ce, d’autant qu’il s’ajoute à une tendance des dernières semaines à la publication de sondages dans la presse… volontairement ou non.

 

La tendance à la multiplication des sondages relatifs aux élections municipales

Ce sondage sur les municipales n’est pas le premier. Dans les dernières semaines de décembre ont été réalisés un certain nombre de sondages, qui ne sont que les premiers d’une vague à venir, souvent sous la commande des candidats eux-mêmes. Ces sondages, qui n’ont pas nécessairement vocation  à être publiés car destinés aux candidats eux-mêmes, paraissent toutefois parfois dans la presse.

Dès lors, il faut préciser immédiatement que cette situation ne change rien du point de vue du droit des sondages. De jurisprudence constante, dès lors qu’un sondage est publié, il doit faire l’objet d’un contrôle de la Commission des sondages quand bien même il n’aurait pas été destiné, au départ, à faire l’objet d’une publication. Le critère de la publication est « purement objectif » [Rapport de 1998, pp. 6-8]. Lorsqu’un sondage a été publié dans la presse, l’institut doit donc en principe fournir à la Commission des sondages (qui a d’ailleurs la faculté de lui demander) la notice du sondage et la Commission peut prononcer une mise au point si celle-ci lui semble nécessaire au regard de la manière dont le sondage a été réalisé ou à la façon dont il a été commenté.

Pour citer un exemple récent, ce fut le cas pour un sondage réalisé pour les élections de Marseille par Opinion way à la fin du mois de décembre, au départ confidentiel, mais finalement publié en deux parties dans la presse et dont la portée était grande puisque 69% des sondés exprimaient le souhait de ne pas voir Jean-Claude Gaudin se représenter.

Par ailleurs, la Commission doit encadrer les phénomènes de « rumeurs » colportées par les journaux, difficilement vérifiables.  Ainsi, pour prendre des exemples récents, de rumeurs sur des sondages réalisés par Viavoice pour la municipalité de Strasbourg qui n’indiquaient rien. Dans un tel cas, l’opinion publique est peu heurtée ; mais les rumeurs faisant état de résultats sont plus problématiques et sont sévèrement sanctionnées par la Commission.

Dans tous les cas, il est prévisible que ces différents phénomènes vont se multiplier et impliquer ainsi un contrôle plus étroit de la Commission des sondages.

L’occasion de poser cette question, un peu maligne : à quand un sondage testant Bernard Tapie publié dans La Provence ? Voilà une hypothèse qui ne manquerait pas de poser d’intéressantes questions juridiques.

 

Romain Rambaud

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